Variations textuelles sur le squirrhe : traduire Galien en français de 1530 à 1570

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Variations textuelles sur le squirrhe : traduire Galien en français de 1530 à 1570
Auteur : Galien de Pergame, médecin grec (c. 129 – c. 201)
Auteur de l'analyse : Daniel Droixhe, Université Libre de Bruxelles et Université de Liège, Professeur et chargé de cours Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique
Publication :

(p. m.) Les six principaux livres de la thérapeutique de Claude Galien […]

Année de publication :

(p.m.) édition de 1558

Nombre de Pages :
n.s
Résumé :

Comment traduisait-on et imprimait-on un médecin antique à la Renaissance ?

Source de la numérisation :
Mise en ligne :
octobre 2021

Daniel Droixhe a enseigné à l’Université Libre de Bruxelles et à l’Université de Liège. En histoire de la médecine, il a notamment publié Soigner le cancer au 18e siècle. Triomphe et déclin de la thérapie par la ciguë dans le Journal de médecine (Paris : Hermann, 2015) et Les charlatans du cancer. Offre thérapeutique et presse médicale dans la France des Lumières (Paris : Hermann, 2018), ainsi que divers articles enregistrés ici ainsi que .

 

Il a fondé avec Muriel Collart la Société wallonne d’étude du dix-huitième siècle.

 

Il est membre du conseil d’administration de la Société française d’étude du 18e siècle, et de celui de de la Société française d’histoire de la médecine ; il est aussi membre de l’Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique

 

 

 

Variations textuelles sur le squirrhe : traduire Galien en français de 1530 à 1570
Daniel Droixhe, Université Libre de Bruxelles et Université de Liège, Professeur et chargé de cours Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique

 

 

Figure 1 : Claude Galien (ca 129 – ca 201 ap. J.-C.) (gravure Georg Paul Busch, ca 1750, Wikimedia Commons)

 

 

Évelyne Berriot-Salvadore écrit, à propos de l’édition des textes majeurs de Galien à la Renaissance, à partir des années 1530 :

 

En un siècle, le vernaculaire conquiert de nouveaux espaces, par le nombre des éditions et des lieux d’impression ou de diffusion, par la diversité des textes et enfin par le public visé1.

 

Par ces traductions en vernaculaire, qui répondent à la fois à « un souci de santé publique » et au « besoin institutionnel » de « défendre le prestige de la Faculté et de l’art contre les erreurs de tous les praticiens ignorants », « une sorte de bibliothèque minimale pour les barbiers et chirurgiens de robe courte » se constitue rapidement. On y trouve notamment « les livres de Galien qui leur sont indispensables, comme La méthode thérapeutique, Du mouvement des muscles, ou De l’anatomie des os ».

Andrea Carlino souligne pour sa part, en introduction d’un volume sur Vulgariser la médecine, à quel point l’écriture médicale en vernaculaire est associée à une double émergence : celle « d’un nouveau public de lecteurs » et celle « d’une reconfiguration de cette discipline en relation aux pratiques discursives adoptées2 ». Le transfert d’un savoir mobilise d’une part des moyens culturels inédits et engage d’autre part les auteurs à réfléchir à la posture qu’ils adoptent en traduisant certains textes et « aux statuts de ces textes en vernaculaire ». En résumé, l’opération donne à lire une médiation qui comporte une transmission : celle « d’un régime d’énonciation à l’autre » et celle « d’un groupe socio-culturel à l’autre », dans une « optique historienne ».   

La traduction s’accompagne par ailleurs du problème posé par l’élaboration d’une nomenclature propre. « Comme en botanique », écrit Magdalena Koźluk,

 

la médecine de l’époque avait à faire face à des problèmes d’identification de ses objets, liés à la persistance d’une tradition ancienne souvent confuse3.

 

Luke Demaitre a bien montré comment une telle identification, au Moyen Âge, se heurtait à une certaine « inconsistance » terminologique, notamment en matière de « cancer » : une notion qu’il s’agit, dit-il, de considérer en tenant compte des « implications médicales de l’époque » et à partir de définitions ou d’analogies dûment mises en relations, plutôt que du point de vue de la science actuelle4. Une nouvelle approche des procédures d’identification des maladies référencées à l’époque a été proposée par Lætitia Loviconi5.

 

 

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On pourrait se demander, écrivait Richard J. Durling dès 1961 dans une étude devenue classique, pourquoi le français, l’italien ou l’allemand n’ont pas été davantage utilisés « pour approvisionner ceux de leur public ayant peu de connaissance du latin et encore moins de grec6 »:

 

La réponse est bien sûr que la majorité des lecteurs potentiels étaient passés par les cours universitaires des arts avant d’entreprendre l’étude de la médecine et étaient dès lors compétents en latin.

 

Parmi ces lecteurs figuraient les chirurgiens, qui généralement, souligne Valérie Worth-Stylianou, n’étaient « censés posséder que des éléments de latin, sans pour autant le lire – et encore moins l’écrire couramment7 ». Aussi les Facultés de Médecine de Paris et de Montpellier, les plus importantes du pays, proposaient-elles des cours d’anatomie en français à leur intention, et l’historienne épingle cas de Paré, qui « avoue avoir lui-même consulté des traductions de Galien fournis par Jean Canape (un des plus grands traducteurs de livres médicaux), puisqu’il n’a pleu à Dieu tant faire de grace à ma jeunesse, qu’elle aye testé en l’une et lautre langue instituée8».

Qu’est-ce qui justifiait l’attachement académique au latin ? Worth-Stylianou mentionne la mise en cause par Paré, chez les médecins, d’une jalousie motivée par des intérêts professionnels à l’égard des chirurgiens. Durling invoquait plutôt, chez les premiers, une réticence à publier les secrets de leur art et il rapporte le cas significatif de de Wilhelm Copp, contraint par la Faculté de suspendre ses lectures en langue vulgaire de l’original latin. Ceci explique, conclut-il, « pourquoi nous ne trouvons pas de version française de Galien avant la fin des années 15309».

Ces lignes datant de 1961, on imagine bien que l’état de la documentation sur les anciennes éditions et traductions de Galien s’est considérablement enrichi. D’une part, la connaissance des éditions latines a surtout progressé à partie des années 1990 grâce à Stefania Fortuna10. D’autre part, l’acquisition et la mise en ligne par l’Osler Library of the History of Medicine (Montréal, Université McGill) d’une traduction problématique de Galien, désormais désignée par OL, ont modifié les conjectures sur la plus ancienne traduction française du corpus. Il s’agit d’une traduction de l’Ad Glauconem de medendi methodo lib. II, publiée sous le titre de Deuziesme livre de Claude Galene intitulé l’art curatoire à glaucon / auquel est specialeme[n]t traicté / des différences d’inflammation et de leur cure11. L’exemplaire de l’ouvrage conservé à l’Osler Library serait le seul actuellement localisé. Le volume se dit au titre Imprimé nouvellement à Paris pour Hieroisme Denys Librayre demourant à la rue Sainct Jasque à l’enseigne de la croix blanche. Cum privilegio.

Le présent article a pour objectif limité de considérer les traitements du squirrhe dans cette édition et dans les autres traductions françaises de la Méthode thérapeutique à Glaucon, des environs de 1530 à 1570. Deux chapitres sont concernés : ceux qui, dans la célèbre traduction de Charles Daremberg, s’intitulent « Traitement du squirrhe en général » (chap. VI) et « Traitement des tumeurs de la rate et du foie » (chap. VII)12. Dans son Histoire du cancer du sein en Occident, Jacques Rouëssé écrit que le squirrhe était traditionnellement considéré, particulièrement à la Renaissance, comme la « première étape » du cancer13. L’auteur ajoute :

 

 Si tous les squirrhes ne mènent pas obligatoirement au cancer, il paraît peu probable que les cancers puissent survenir sans passer par le stade de squirrhe.

 

Dans ses Définitions médicales, Galien écrivait : « Le squirrhe est une tumeur des corps avec dureté et poids et mobilité ainsi que sans difficulté au toucher » (article CCLXXXV)14. Galien y qualifie par ailleurs le cancer ou carcinome de « tumeur maligne et très dure sans ulcère ainsi nommée d’après le crabe » (article CCCXCIII)15. Il n’y avait donc pas de relation explicite, à ce stade, entre le squirrhe et le cancer.

On pourrait s’étonner de ne pas voir ajouté à l’examen des traductions des considérations sur le squirrhe celui du chapitre XII du livre II du Glaucon où Galien envisage les « Causes et traitement du cancer et de l’éléphantiasis »16. Ceci s’explique par le fait que la traduction du livre II est incomplète dans l’exemplaire de l’OL et que le chapitre en question fait défaut. La dernière page, qui porte la signature Hiv r°, conclut le chapitre XI sur « La curation de gangrene » (référence au medicament dit tetrapharmacon et macedonicum, etc.)17. La courte sélection des passages du Glaucon examinés s’explique par ailleurs – si elle ne se justifie pas – par l’état de mes recherches personnelles sur le squirrhe et le cancer de la rate et du foie au début des temps modernes18 et sur la relation entre cancer et diététique à la même époque, particulièrement dans les consilia et consultations à Padoue19.

 

 

 

 

Le volume de l’Osler Library : aspects éditoriaux

 

 

 

Figure 2 : Édition conservée à l’Osler Library of the History of Medicine (Montréal, Université McGill).

Je remercie Mary Hague-Yearl, Gregory Houston et Lily Szczygiel pour leur aimable autorisation de diffusion.

 

 

L’ouvrage conservant la traduction conservée à Montréal a fait l’objet d’un article intitulé « The Earliest Known French Translation of Galen (ca. 1530) at the Osler Library », dû à William Kemp20. On n’en discutera ici que les aspects généraux. Ce volume in-quarto de 32 feuillets, incomplet à la fin, se distingue des « autres éditions légèrement plus tardives de traductions françaises de Galien » en ce qu’il est imprimé « en une typographie gothique bâtarde ». La police serait de type Fraktur bien que certains caractères, en particulier les majuscules, s’apparentent plutôt au type Textura, plus anguleux. Une barre oblique est parfois utilisée pour marquer une séparation qui correspondrait plutôt, aujourd’hui, à un point entre deux phrases plutôt qu’à une virgule. Les pages ne comportent pas de pagination mais des signatures composées, selon l’usage, d’une lettre majuscule suivie d’un chiffre romain.

 

 

 

Figure 3 : page de l’édition de l’Osler Library illustrant certains aspects de la typographie : barre oblique marquant une séparation correspondant à un point entre deux phrases (lignes 7, 16, 26), signature.

 

 

« Le colophon », poursuit Kemp, « a dû contenir la date d’impression, mais la page de titre ne l’a pas – bien qu’elle mentionne le nom de l’imprimeur parisien, Jérôme Denis ». La traduction serait postérieure à 1528, date de parution de l’édition latine sur laquelle elle se fonde, c’est-à-dire le De arte curativa ad Glauconem libri duo donnée par Niccolò Leoniceno et publiée par Simon de Colines21.

 

 

 

Figure 4 : Paris, Bibliothèque nationale de France, 8-TE17-10 (cliché Muriel Collart).

 

 

Selon une notice biographique du catalogue de la Bibliothèque nationale de France, la période d’activité de Jérôme Denis se situerait entre 1527 et 1534. S’il fut « condamné au bûcher comme hérétique lors de l’affaire des Placards en octobre-décembre 1534 », « il est possible qu’il n’ait pas été supplicié22 ». Une seconde notice biographique de la BnF – qui n’est malheureusement pas mise en rapport avec la précédente – nous apprend que Denis s’établit en 1529 à l’adresse de l’imprimeur-parisien Guillaume Du Puis, décédé avant cette date23. Une inscription figurant à la page de titre du Deuziesme livre de Claude Galene intitulé l’art curatoire à glaucon, sous les personnages de Clio et de Terpsichore, peut se lire « XXVI » ou « DXXVI », mais ne peut renvoyer à 1526.

Tout paraît donc indiquer, comme le suggèrent Kemp et Véronique Boudon-Millot, que le volume parut aux environs de 1530. Denis était à l’époque intéressé par l’édition médicale puisqu’il publie cette année-là le De morbis et symptomatis, libri sex de Galien24. V. Boudon-Millot conclut que cette datation, « si elle est exacte (le colophon qui devait contenir la date d’impression a disparu), remettrait en cause l’antériorité de l’imprimerie lyonnaise pour les traductions françaises de Galien », dans la mesure où « la traduction française du livre IV du De methodo medendi par Jean Canape, parue à Lyon chez F. Juste en 1537, a longtemps été considérée comme la plus ancienne traduction galénique en langue française 25 ».

 

 

Guillaume Chrestian, auteur de la deuxième traduction française du Glaucon  (1549)

En 1549 paraît la deuxième traduction française de l’Ad Glauconem de medendi methodo lib. II de Galien. Elle est publiée par le Parisien Regnault Chaudière et son fils Claude. L’ouvrage s’intitule Le second livre de Claude Galien a Glaucon de l’art de curer monsieur maistre Guillaume Chrestian, medecin, lisant a Orleans. On désignera désormais cette traduction par GC.

Guillaume Chrestian, aussi appelé Chrestien ou Cristian (1500-1558), n’est mentionné ni par Eloy ni par Jean-Eugène Dezeimeris dans leur Dictionnaire historique de la médecine ancienne et moderne26. Il fut pourtant un des médecins de François Ier et l’un des plus importants traducteurs, en français, des œuvres de Galien.

Il avait participé dès 1536 à leur diffusion en donnant un Philalethes sur les erreurs anatomiques de certaines parties du corps humain. L’ouvrage portait en colophon : « Imprime a Lyon par Iehan Barbou, dict Le Normand, 1536 ». Il était cependant vendu à Orléans par le libraire François Gueiart ou Gueiard. Il s’ouvre par un morceau qui le destine « à l’érudition des nouveaux chirurgiens 27 ». Les circonstances de la publication y sont explicitées. Au couvent des Jacobins d’Orléans s’est tenue une « dispute » sur des questions d’anatomie. Le débat a notamment porté sur les « huit muscles de l’abdomen que les Grecs appellent Epigastrion », sur « un pannicule charneux » dont il est fait mention et sur « certaines autres parties ». Celui qui est désigné sous le nom de Philalethes a longtemps pressé Chrestian par ses « prières » de s’exprimer « plus vivement par écrit » sur l’objet de la discussion. C’est que Chrestian a « souvent assez intentivement » contredit son interlocuteur. Il a cependant réservé sa réponse, tant il était occupé « à plus haute chose, ou à tout le moins à moi plus profitable », c’est-à-dire, peut-on croire, à ses activités de traducteur. Il trouvait peu soutenable qu’une « telle noble science » comme la médecine soit « contemnée » – méprisée, dégradée – « si elle est faite trop vulgaire et commune à un chacun qui n’est adonné à cet art ou qui n’a savoir suffisant des lettres latines ». Chrestian s’adresse dès lors dans ces termes à son interlocuteur :

 

Il faut nécessairement que je te le déduise en langage François, par ce que tu t’excuses ne pouvoir bien entièrement entendre ce qu’en langue Latine très ornée en ont écrit et traité les bons auteurs. 

 

Il s’agira donc pour lui « de faire connaître aux autres Chirurgiens la pure et légitime vérité », afin qu’ils ne s’égarent plus en « erreurs tant dommageuses pour le corps humain ».

Dix ans plus tard, il adresse l’avant-propos de sa traduction de la Méthode à Glaucon au « très avisé Martin Akakia, docteur en médecine, très expérimenté dans l’une et l’autre langue ». Il s’est en effet fondé sur l’édition latine de l’Ad Glauconem de medendi methodo lib. II qu’avait donnée « voici six ans » Martin Akakia. Comme l’avant-propos est daté du 26 avril 1548, la précision renvoie à l’édition Akakia publiée en 1542 à Venise par les Giunti (illustration 8)28.

Martin Akakia, autre figure majeure de la traduction française d’ouvrages médicaux et également attaché à François Ier, fut « le chef d’une famille qui se distingua longtemps dans la médecine », écrit Dezeimeris29. Il était né à une date indéterminée à Châlons-sur-Marne comme l’indique la qualification qu’il revendique de cataleunensis, parfois malencontreusement interprétée comme catalan30. Il s’était fait remarquer par Pierre Brissot (1478-1522), professeur de la Faculté de médecine qui s’était rendu célèbre pour avoir dégagé la doctrine d’Hippocrate et de Galien des détournements ou falsifications des Arabes, particulièrement Rhazès et Avicenne, qui dominaient l’enseignement européen31. Pierre Bayle avance qu’Akakia apprit de Brissot « la plupart des choses qu’il publia ensuite sur Galien »32. Il est l’ami de Marot, valet de chambre du roi, et il est choisi en 1545 pour représenter l’Université à la première séance du Concile de Trente – même si la France, jugeant que l’Empire domine les débats, dédaigne la rencontre. On lui attribue parfois le De morbis muliebribus libri II, paru en 1597.33 Mais l’ouvrage serait de son fils, également prénommé Martin.

 

 

 

Figure 5 : Portrait de Martin Akakia (Paris, Collection Académie nationale de chirurgie, cote CIPB1461. Licence ouverte).

 

 

L’avant-propos adressé par Chrestian à Akakia en dit davantage sur ses préoccupations. Chrestian a pensé, comme d’autres, auparavant,

 

qu’il était dommageable de mettre des livres de chirurgie en langue vulgaire, dans les mains d’un public peut-être trop ordinaire et d’une multitude ignorante qui ne comprendrait que de travers un art et des œuvres qui seraient ainsi corrompus.

 

Mais il a bien dû constater par sa pratique régionale à quel point les étudiants qu’il côtoyait étaient moins formés en latin que ceux de Paris. Et que dire, ajoute-t-il, de ces barbiers – ces tonstrini peut-être qualifiés « pour couper, peigner ou orner les barbes » ? Ils sont plus incultes que des enfants, des adolescents et des apprentis « dont la plupart ne savent même bien s’exprimer ou écrire en français », au point « qu’il leur manque ce que postule la doctrine, c’est-à-dire la connaissance des belles lettres »34 . Il y a une différence entre s’occuper des soins capillaires ou de s’amuser avec un cornet à dés (fritillus) et « l’art saint et noble » de la chirurgie.

Les erreurs qu’entraîne une mauvaise connaissance des langues peuvent être hautement nuisibles. Chrestian en donne des exemples qui concernent la gangrène ou le lupus, c’est-à-dire le loup ou la loupe « tumeur indolente et enkystée qui vient sous la peau »35. On contribuera à les prévenir en donnant en français à ceux qui sont insuffisamment formés « quelques écrits de Galien, convenables pour l’apprentissage de la chirurgie »36.

 

 

Chrestian, médecin du peuple et des grands

Un épisode illustre l’attention que Chrestian portait à cette large diffusion de l’œuvre de Galien37. En 1553, il donne une traduction du traité d’Hippocrate Περί φύσιος παιδίου sous le titre De la nature de l’enfant au ventre de la mere38.

 

 

 

Figure 6 : Édition conservée à l’Army Medical Library (Washington D.C.), reproduite dans Gallica.

 

 

Il prend ici les titres de Medecin de la Royne, et de Monseigneur le Duc de Buillon. Sa charge auprès de Catherine de Médicis (1547-1559) est moins significative que celle qui l’attache à la Maison de La Tour d’Auvergne, liée à la reine par Madeleine de La Tour d’Auvergne (1498-1519), mère de Catherine de Médicis. C’est en effet à la « duchesse de Buillon » que Chrestian adresse la « Préface » du livre. « Dame d’honneur de la reine », la duchesse montre une « bonté d’esprit » qui la pousse à désirer « d’entendre les choses dignes d’être connues, non seulement des hommes, qui proprement sont créés à toute philosophie, mais aussi des femmes vertueuses »39. Galien n’écrit-il pas « au neuvième livre des Sentences arrêtées d’Hippocrate, et de Platon » que les femmes « sont semblables aux hommes, en ce qu’elles sont rationnelles, et capables de science (néanmoins qu’elles y soient quelquement inférieures) »? Chrestian s’est trouvé engagé à traduire le traité d’Hippocrate par la « charité que vous fîtes, cet hiver dernier, à une pauvre femme de Sedan », qui était en très grave travail d’accouchement et pour laquelle la duchesse fit appeler Chrestian « pour lui donner secours, en votre présence ».

Les circonstances fournissent à la dame, rapporte le médecin, l’occasion de « me demander plusieurs raisons de la conception, génération, formation, nutrition, perfection, et naissance de l’enfant ». Un long texte de présentation s’ensuit, que Chrestian date du 12 avril 1553, de Château-Thierry. La ville appartenait alors à la Champagne. Le livre se présente, au titre, comme un Traicté trèsutile à tous celulx qui sont studieux des merveilleux secrets de Philosophie naturelle, et d’une partie de Medecine Physiologique. 40

Worth-Stylianou ajoute à l’épisode une autre occasion qui fut offerte à Chrestian d’initier une femme « aux grands secrets de la médecine ». Celui-ci dédie à Diane de Poitiers, favorite de Henri II, sa traduction du De mensibus mulierum et hominis generatione de Jacques Dubois ou Sylvius, sous le titre de Livre de la nature et utilité des moys des femmes et de la curation des maladies qui en surviennent (1559). Ainsi offre-t-il un secours

 

aux femmes tant pusillanimes et craintifves, qu’il leur sembleroit avoir engagé leur honneur, ou offensé leur pudicité si elles descouvroient leurs griefves passions aux medecins doctes et bien experimentez, qui ne peuvent toujours deviner sans preallable declaration, ne congnoistre leurs secretes maladies41.

 

La pudeur entourant l’expression des « secrets » d’un « corps féminin qu’une patiente n’ose nommer » ne doit cependant faire l’objet d’une rétroprojection excessive. La réticence à certains examens gynécologiques, notamment en cas d’affections de l’utérus, a parfois été insuffisamment documentée – au moins pour certaines périodes42. En tout cas, les femmes du xviiie siècle mesuraient tout à fait l’importance de palpations intimes et pouvaient décrire assez librement au praticien les étapes des maladies les plus graves, quand il s’agissait de les surmonter et, en un mot, de survivre. 43 Worth-Stylianou fait par ailleurs observer que la mise à disposition de livres de médecine en langue vulgaire, dans des milieux féminins, allait à l’encontre de l’idée d’une condamnation qui frapperait la circulation de ce genre d’ouvrage « au nom de l’immodestie et de la dissolution des mœurs »44. Sans doute la pudeur empêche-t-elle parfois les femmes de consulter un médecin et de parler de leurs « griefves passions » - « et aux dires de Guillaume Chrestian, de Laurent Joubert, ou de Charles Guillemeau, le nombre n’est pas négligeable ». Mais au moins celles qui auront pu consulter ces ouvrages ou en avoir des échos sauront-elles, selon les mêmes auteurs, « rendre compte de leurs maladies ».

 

 

Les traductions de l’Osler Library (1530) et de Chrestian (1549): un essai de comparaison textuelle

Il convient d’abord d’indiquer que l’organisation textuelle de la traduction de l’Osler Library, dénommée ici par commodité « édition de 1530 », et celle de Chrestian de 1549 offrent des différences significatives, que l’on résume. Les chapitres étaient annoncés d’une lettre dans le manuscrit grec de Galien (α, β, γ, etc.) 45. La transcription latine de 1528 fournie par Leoniceno constitue le modèle suivi par les traductions46. Dans l’édition de 1528, le chapitre VI sur le squirrhe commence par le signe , sans alinéa47. Dans la traduction de 1530, le même signe ouvre, sans numérotation, le chapitre intitulé « De la manière de curer scyrus » (p. E.i r°). L’édition latine d’Akakia de 1542, à laquelle se réfère Chrestian, introduit les chapitres sans numérotation par l’indication « TEX. », suivie du commentaire indiqué par « COMMENT. »48 Elle adopte un séquençage particulier en découpant le chapitre sur le squirrhe en sections qui portent successivement sur le squirrhe en général et les tendons, avec de longs passages de commentaires. 49 La traduction française de 1549 introduit le chapitre par « Chap. » et un numéro (« IV »)50. On notera que ce dernier ne correspond pas à l’ordre des chapitres adoptés par Kühn et Daremberg, de même que les chapitres précédents51. Le texte de 1549 se trouve par ailleurs divisé sans numérotation de chapitres par le simple titre de « GALIEN », suivi d’un texte introduit par le terme « ACAKIA ». Cet extrait correspond manifestement à la section introduite par « COMMENT. » en 1542. On notera que l’ordre des chapitres ne correspond pas ici à celui adopté par Kühn et Daremberg. L’affirmation de Chrestian selon laquelle sa version latine de référence est celle d’Akakia de 1542 est par ailleurs tout à fait vérifiée.

Dans la traduction latine de Kühn, le chapitre sur le « Traitement du squirrhe en général » commence par opposer chez Galien l’exquisitus scirrhus et le non exquisitus 52. Galien précise ce sens médical à la fin du livre I du traité Des lieux affectés, où il considère « les faits qui surviennent dans les organes » de deux points de vue : comme physiques ou comme psychiques53. Une altération résultant d’un contact des corps voisins engendrera une impression physique. L’impression psychique consistera dans le sentiment produit par l’altération, qui pourra être d’un degré variable, plus ou moins légère, à moins que les organes « n’aient une faculté sensible exquise ». Et Galien ajoute : « J’appelle exquise (ακριβης) celle qui distingue les moindres sensations ».

Daremberg traduit exquisitus/non exquisitus par « squirrhe pur » et « squirrhe qui n’est pas pur »54. Dans la traduction de 1530, exquisitus est rendu par legitime, qui est plutôt un terme de loi ou de règlement. Chrestian traduit par exquis, en se conformant à l’original (illustration 10). Ce terme, d’un point de vue moderne, peut sembler déroutant, en ce qu’il dénote aujourd’hui une sensation agréable. Le Dictionnaire de la langue française du seizième siècle de Huguet, le Dictionaire francoislatin de Robert Estienne (1539), le Trésor de la langue française et d’autre répertoires mentionnés par le Dictionnaire du moyen français fournissent pour exquisitus des traductions du type « cherché, recherché, choisi, raffiné »55. Mais le TLF enregistre aussi le sens médical de l’expression douleur exquise pour désigner une « douleur vive et nettement localisée en un point très limité », et l’emploi est encore repéré au xxe siècle chez Jean Cocteau dans le Grand écart (1923).

 

 

Histoire lexicale et professionnalisme

Le cas d’exquisitus pose la question de savoir si les variantes lexicales des deux traductions relèvent plutôt de l’histoire de la langue ou du caractère professionnel que leur prête l’auteur. L’interrogation concerne particulièrement le chapitre traitant du squirrhe de la rate ou ratelle. Galien distinguait celui-ci d’un gonflement venteux qui était en principe moins dangereux. Les éditions latines de de Leoniceno et d’Akakia s’exprimaient à ce sujet dans les mêmes termes56. Le traitement de l’affection consistait à piquer le squirrhe en y appliquant ce que l’OL appelle de l’absinthe57. Chrestian avait nommé celle-ci aluÿsne mais le terme a été barré dans l’exemplaire de la BNF et effectivement remplacé dans la marge par aluÿsne58 Le terme aluine, largement attesté en ancien et moyen français, était peut-être vieilli et risquait de ne plus être compris, à moins qu’il apparaisse davantage lié au vocabulaire professionnel59. Le produit figure en 1552 sous la forme absynthe dans la traduction française du De alimentorum facultatibus par « maistre Jehan Massé, médecin, Champenois, habitant de Saint-Florentin ».

 

 

 

Figure 7 : Paris, Bibliothèque nationale de France, 8-TC18-10 (cliché Muriel Collart).

 

 

À côté de la rate, Galien envisageait au chapitre VII le squirrhe du foie. Le traitement consiste à désobstruer le viscère de l’humeur dont il est chargé, c’est-à-dire, traduit l’OL, de l’ouvrir, tandis que GC emploie le terme déoppiler, proche du latin et qui semble relever davantage du langage professionnel60. Dans le même sens, l’OL traite des « parties scelerotiques endurcies » là où GC les qualifie d’incunées61. Ce terme est également utilisé par Chrestian au chapitre du Glaucon qui traite « De l’inflammation et de ses différentes espèces »62. Il y est question de l’afflux d’humeur – sang ou bile jaune – qui se concentre en un organe et qui ne se putréfie qu’une fois fixée dans celui-ci63. Bref, la traduction de l’Osler Library adopte dans les deux cas une terminologie plus simple, plus compréhensible à un large public.

Le squirrhe de ce que Galien appelle les tendons, c’est-à-dire les prolongements nerveux des muscles, réclame aussi un traitement particulier64. Une pyrite sera rougie au feu ; on versera sur celle-ci du vinaigre très mordant, de sorte que le squirrhe sera exposé à la vapeur qui s’en dégage. L’OL stipule qu’à défaut de pyrite, on emploiera « une autre pierre dicte molaris », c’est-à-dire « tant celle de quoy la meule est faicte come aussi celle qui meult le frument ou bled »65. Chrestian écrit qu’à défaut de « la pierre pyrites, qui vulgairement est appellee marcasite », on usera « de la molaire » c’est-à-dire de « la pierre de laquelle on faict les meules pour mouldre le bled »66. Comment distinguer quelle formulation serait la plus accessible ?

Un autre cas présente la même difficulté. Le jeune esclave appartenant au nommé Cercyllius souffre d’un squirrhe de la cuisse. Galien l’assied dans un récipient contenant une grande quantité d’oleum sabinum c’est-à-dire de l’huile essentielle extraite de la plante nommée sabine67. Que tirer du fait que l’OL traduit par « poille ou cuvette », moderne poêle, et que GC traduit par bagnoire ?68

 

 

La désignation des médicaments

Une différence constante, qui oppose les deux traductions, est également illustrée par le cas de l’esclave de Cercyllius. L’affection a été combattue par un enduit comportant du « bdellum scythicum », du « masticem egiptiam » et de l’ « ammoniacum vaporativum », lit-on dans l’OL69. GC traduit : « bdellium de Scythie, mastich d’Egypte, gumme ammoniac »70. On en retiendra surtout que le traducteur anonyme du volume de l’Osler Library a ajouté vaporativum à l’original latin de Leoniceno71. Ce traducteur tient à montrer qu’il connaît ce dont il parle et qu’il s’agit d’un parfum.

D’autres médicaments connaissent la même alternance entre latin et langue vulgaire. OL mentionne ceux-ci en latin en reproduisant, en général, les appellations de Galien. Ainsi, la cure du squirrhe de la rate exige le recours à des applications ou à des potions d’usage interne dont les meilleurs ingrédients sont les « cortices radicus capparis scolopendrium et mirice radix et mirice germina »72. GC utilise « l’escorce de la racine de capres, et les racines et petits rameaux de scolopendre, et de Tamarix », à condition de tous les cuire « en vinaigre, et en oxymel » 73.

Le tamarix ou tamaris était réputé en médecine, écrit Pierre-Jean-Baptiste Chomel, pour soigner « les opilations du foie, de la rate et des autres viscères »74. Il est associé à l’écorce de la racine de câpres dans une prescription adressée par Giovanni Battista Da Monte, célèbre professeur à Padoue, à un jeune homme d’Udine qui souffre « d’obstructions et de dureté de la rate, avec un danger d’hydropisie »75.

En cas de squirrhe du foie, l’OL recommande d’appliquer des emplâtres composées de « nardus indica et celtica », de « crocus », de « melinus » et d’« oenanthe mastichum chya » 76. GC traduit : on emploiera les « deux nardz », du « saffran », de l’onguent de « coings » et du « mestich de lisle Chios » 77. Le nardus, écrit aussi Chomel, pouvait être « indique », quand il venait des Indes orientales, ou « celtique », quand il venait du Tyrol ou des Alpes 78. Le premier intervenait en tant que spic-nard dans les thériaques, de sorte que son appellation latine pouvait être connue d’un assez large public, et il en va sans doute de même du mastic, une gomme-résine qui servait à activer la salivation. Mais le crocus était-il aussi immédiatement compris comme du safran par le même public ? Et le mellinum de l’OL, plus connu en latin sous la forme melinum, renvoyait-il aussi clairement à cette « huile de coings » dont parle Pline l’Ancien79?

 

 

Jean Canape, auteur de la traduction de l’Osler Library ? Les éditions de 1554, 1558 et 1570

Posée par Kemp, la question de l’identité du traducteur de l’OL peut s’éclairer par les traductions contenues dans trois autres ouvrages parus après 1550. Tous se présentent sous le titre suivant : Les six principaux livres de la Thérapeutique de Claude Galien, avec le deuxiesme De l’art curatoire à Glaucon. Ils parurent respectivement en 1554, 1558 et 1570 aux adresses d’Oudin Petit à Paris, de Thibauld Payen ou Payan à Lyon et de Jean Ruelle le jeune à Paris80.

 

 

 

Figure 8 : Édition de 1554 (Wellcome Collection, Creative Commons, Public Domain Mark. Reference number b10327381).

 

 

 

Figure 8bis : Édition de 1558 (Paris, Bibliothèque nationale de France, 8-TE17-3 (B) ; cliché Muriel Collart).

 

 

Figure 8ter : Édition de 1570 (Paris, Bibliothèque interuniversitaire de santé).

 

Le catalogue de la BNF mentionne à plusieurs reprises le nom de Jean Canape ou Canappe comme auteur de ces traductions. Jean Canape, lecteur public de chirurgie à Lyon et médecin de François Ier, était un des plus importants traducteurs de Galien en français. Il inscrit plusieurs fois son nom ou le pseudonyme de « Philiatrios » au titre de traductions de l’ancien maître, à partir de 1537 : le Quatrième livre de la Thérapeutique (1537)81 ainsi que le Cinquième et le sixième (s.d.)82 ; le traité Du mouvement des muscles (1541, 1556)83 ; les Deux livres des simples, c’est-à-dire le Cinquième et le sixième (1542)84. Plusieurs de ces éditions sont dues au Lyonnais Étienne Dolet.

On compare ci-dessous les premières lignes du chapitre sur le squirrhe dans l’OL et les trois autres traductions considérées. Les abréviations de l’OL ont été converties en fonction de l’orthographe moderne. Mais on conserve celles des autres traductions, susceptibles de suggérer une filiation de celles-ci. Il en va de même, pour ces dernières, de la ponctuation. On a conservé les graphies anciennes

OL, p. Ei r°, l. 23-28 : Scyrrus legitime est tumeur c nature insensible & dure : mais le scyrrus nõ legitime est celuy qui nest totallemẽt insensible. Touteffoys est il difficile sentimẽt dont led scyrus qui est insensible ne recoit imais curation. Davantaige qt est de celuy qui est difficile sentit fault scavoir quil nest pas du tout ĩcurable, biẽ q a peine iceluy se peult gairi.

Éd. de 1554, p. 249 v°, l. 4-12 : Scirrhus legitime est tumeur contre nature insensible & dure : mais le scirrhus non legitime est celuy qui n’est totalement insensible : toutesfois est il de difficile sentiment. Donc ledit scirrhus qui est insensible ne reçoi iamais curation. Davantaige quant est de celuy q est de difficile sentimẽt faut scavoir qu’il n’est pas du tout incurable combien que a peine iceluy se peut guarir.

Ed. de 1558, p. 249 v°, l. 3-11 : Scirrhus legitime, est tumeur cõtre nature insensible & dure : mais le scirrhus nõ legitime est celuy qui n’est totalement insensible : toutesfois est il de difficile sentiment. Donc ledit scirrhus qui est insensible ne reçoit iamais curacion. Davantage quãt est de celuy qui est de difficile sentiment, faut sçavoir qu’il n’est pas du tout incurable combien que a peine iceluy se peut guerir.

Ed. de 1570, p. 249 v°, l. 4-12 : Scirrhus legitime est tumeur contre nature insensible et dure : mais le Scirrhus non legitime est celuy qui n’est totalemẽt insensible : toutesfois est il de difficile sentiment. Donc ledict Scirrhus qui est insensible ne reçoit iamais curation. Davantage quand est de celuy qui est de difficile sentimẽt faut sçavoir qu’il n’est pas du tout incurable combien que à peine iceluy se peut guarir.

 

Le tableau ci-dessous étend et détaille la comparaison des éditions. L’indication des lignes, représentée par « l. », montre une discordance de composition.

 





 

OL – Éd. de 1530 

Éd. de 1554

Éd. de 1558

Éd. de 1570

1

Ei r°, l. 2-3 restringnẽt

249 v°, l. 20 restringnent

249 v°, l. 19-20 restraingnent

249 v°, l. 20 restraignent

2

Ei v°, l. l.5 resolutifz

249 v°, l. 23 resolutifs

249 v°, l. 23 resolutifs

249 v°, l. 23 resolutifz

3

Ei v°, l. 5 diminutiõ

249 v°, l. 24 diminution

249 v°, l. 24 diminucion

249 v°, l. 24 diminution

4

Ei v°, l 6-7. Curatiõ

249 v°, l. 26 curation

249 v°, l. 26 curacion

249 v°,l. 26 curation

5

Ei v°, l. 10 endurci

250 r°, l. 2 endurci

250 r°, l. 2 endurci

250 r°, l. 2 endurcy

6

Ei v°, l. 11 garir

250 r°, l. 4 guarir

250 r°, l. 4 guerir

25 0r°, l. 4 guarir

7

Ei v°, l. 16-17 defaillante

250 r°, l. 9 deffaillãte

250 r°, l.12

defaillante

250 r°, l. l. 9 deffailãlte

8

Ei v°, l. 18 seuffre

250 r°, l. 14 seuffre

250 r°, l. 14l souffre

250r °, l. 14 souffre

9

Ei v°, l. 21 mention

250r °, l. 18 mention

250 r°, l. 19 mencion

250 r°, l. 18 mention

10

Ei v°, l. 27 et 28

loye

250 r°, l. 25 et 27 l’oie

250 r°, l. 28 l’oye et 28 loye

250 r°, l. 25 et 27 l’oie

11

Eii r°, l. 2 dispositions

250 v°, l. 5 dispositions

250 v°, l. 5 disposicions

250 v°, l. 5 dispositions

12

Eii r°, l. 13 devoiẽt

250 v°, l. 20 devoint

250 v°, l. 21 devoient

250 v°, l. 20 devoiẽt

13

Eii r°, l. 14 et 19

(je) feroys, faisoys

250 v°, l. 21 et 27 ( je) faisoi, faisoi

250 v°, l. 21 et 28 (je) faisois

250 v°, l. 21 et 27 (je) faisois

14

Eii r°, l. 17 (je) scavoye

250 v°, l. 25 (je) sçavoi

250 v°, l. 26 (je) sçavois

250 v°, l. 25 (je) sçavois

15

Eii r°, l. 24 mention

251 r°, l. 5 mention

251 r°, l. 5 mencion

251 r°, l. 5 mention

16

Eii r°, l. 30 (je) emplastroys

251 r°, l. 13 (je) emplastroi

251 r°, 14 (je) emplastrois

251 r°, l. 13 (je) emplastroi

17

Eii v°, l. 1 (je) meslois

251 r°, l. 14-15 (je) mesloy

251 v°, l. 15 (je) meslois

251 r°, l. 14-15 je mesloy

 

L’édition de 1554 est la seule qui reproduise la forme archaïque seufre pour souffre (pt. 8), ce qui tendrait à suggérer qu’elle est la première ou la seule à avoir suivi l’original de l’OL de 1530. Mais la supposition est contredite par un fait qui joint à l’orthographe la concaténation d’un terme et de son article. L’OL écrit que la graisse de loye est la meilleure, après celle du lion, en tant que « simple médicament » applicable aux « squirrhes endurcis ». La liaison est reproduite une fois par la seule édition de 1558 : reproduction de l’édition de 1530 ou réflexe archaïsant ?

Les seules informations décisives qu’on puisse recueillir du tableau concernent l’unité typographique des éditions de 1554 et 1558. La première orthographie la première personne du singulier de l’indicatif imparfait en –oi et non en –ois (pts 13,14, 16 et 17). L’édition de 1558 orthographie en –ion les finales des mots en –tion (pts 3, 4, 9, 11 et 15). Elle est aussi la seule à moderniser l’ancienne forme garir de l’OL en guerir (pt. 5).

À l’inverse, l’édition de 1570 est la seule à reproduire la graphie resolutifz de l’OL (pt.2). Elle est même la seule à présenter la forme archaïsante endurcy qui n’est pas dans l’OL (pt. 5). Ceci est évidemment paradoxal, en considération de la date de l’ouvrage. L’édition la plus récente serait celle qui conserve l’orthographe française la plus ancienne.

Tout ceci invite à penser que la traduction de l’Osler Library serait déjà due à Jean Canape. L’entreprise peut en tout cas s’expliquer par le mouvement de concurrence qui anime alors les éditions latines à partir des environs de 1530.

 

 

Conclusion

On voudrait pouvoir conclure de manière assertive concernant plusieurs des questions posées. La principale a trait au volume acquis par l’Osler Library. Si la datation de celui-ci aux environs de 1530, déjà proposée par W. Kemp, est renforcée par la prise en compte approfondie et actualisée des conditions bibliographiques de l’édition, la possibilité d’une identification de l’auteur de la traduction est posée par les rapports étroits qu’elle entretient avec trois traductions de 1554, 1558 et 1570 dont les deux premières sont explicitement revendiquées, au titre, par Jean Canape. Celui-ci, poussé par le mouvement d’édition latine de l’Ad Glauconem de medendi methodo lib. II, qui se développe à partir de la fin des années 1520, aurait-il hésité à mettre son nom en tête d’une « vulgarisation » alors inédite ? Aurait-il assumé plus tard cette responsabilité après 1550 – à la suite précisément, de la parution de la traduction française de Guillaume Chrestian ? Il est parfaitement imaginable que celui-ci, se trouvant engagé dans une carrière de traducteur, ait voulu dépasser celui dont il était devenu le principal concurrent.

Le marché éditorial des années 1530-1550 était de nature à favoriser des entreprises rivales. On a esquissé le tableau géographique que présentent les impressions et la distribution des traductions de Galien par rapport à celui établi par Worth-Stylianou pour les lieux d’impression des livres médicaux en vernaculaire en France, et on a émis l’hypothèse d’un développement du travail de vulgarisation en Champagne, en rapport avec la création de l’Université de Reims (1548).

À côté d’un facteur s’inscrivant dans l’espace national, on a considéré quelle part la conscience du devoir professionnel et social a prise dans les conceptions de Chrestian qui étaient de nature à stimuler son travail de diffusion du galénisme. Canape et Chrestian sont tous deux attachés à François Ier. Mais le second, s’il est médecin des grands, se montre aussi praticien de terrain au service des plus humbles, lors de l’intervention par laquelle il répond à la duchesse de La Tour d’Auvergne, mère de Catherine de Médicis. Lui-même justifie longuement ses traductions en tant qu’elles sont écrites « à l’intention de nos chirurgiens » (avant-propos latin du Glaucon), qu’elles doivent servir « à l’érudition des nouveaux chirurgiens » (Philalethes) et plus généralement qu’elles sont destinées à tous ceux qui sont insuffisamment formés, tels ses étudiants de province, voire les barbiers. Si les chirurgiens appartenaient à la corporation des barbiers, ils pouvaient établir avec ceux-ci des relations qui étaient loin d’être confinées à la rivalité dont traitent si souvent certains ouvrages s’enfermant dans des images d’Épinal85. Le praticien que Galien vouait à considérer sur la plus large échelle la « distinction des moindres sensations », dans son diagnostic, était de facto invité à prendre en compte celles de ce qu’on appelle à l’âge classique le « plus grand nombre » et à y rendre sensible ses étudiants – en particulier ceux d’Orléans que Chrestian a quelque peine à former, avoue-t-il. À défaut d’une connaissance du latin égale à celle que montraient les écoliers de Paris, le passage par la traduction française offrait un substitut de première nécessité.

L’attachement géographique de Chrestian, plus déterminé que celui de Canape, et les conditions – mal connues – dans lesquelles furent composées et imprimées ses traductions ont-elles joué un rôle dans les différences textuelles relevées concernant les chapitres du squirrhe ? Le seul exemple de la reproduction latine des médicaments prescrits ouvre le champ d’interprétations très différentes et parfois opposées. Le traducteur obéit-il au respect de l’original latin de Galien, comme le fait Canape ? Répète-t-il de façon quasi mécanique les leçons de Leoniceno ou d’Akakia ? Entend-il par là montrer l’excellence de son savoir ? Songe-t-il à la manière, toute pratique, dont le soignant devra s’adresser à l’apothicaire, à qui les noms latins sont immédiatement accessibles – et d’une certaine façon plus clairs ? À l’opposé, Chrestian, en traduisant les médicaments en langue vulgaire, passe-t-il outre la pratique d’un autre âge, désuet, en appliquant strictement ses conceptions de « praticien de terrain » ?

L’éventuelle marque professionnelle du lexique se présente en outre en concurrence de la marque socialement référentielle, ce qui ne rend pas plus facile l’interprétation des différences. Quel sens donner à l’utilisation du mot baignoire – surtout si l’on s’aventure sur le terrain dialectal et régional auquel invite la forme bagnoire ?86 Le terme traduit-il, par rapport à un matériel de toilette appartenant davantage aux classes dites « populaires », un état de langue ou un état social ? On a aussi vu combien la datation de vocabulaire peut intervenir dans la concurrence d’aluine et d’absinthe. La préférence de Chrestian pour le premier terme exprime-t-elle un traditionalisme, un attachement à l’ancienne langue, au parler régional ?

Le temps et l’espace se disputent décidément des alternances qui ne peuvent, pour l’instant, que laisser l’historien perplexe. Le champ d’exploration, dans le cas traité ici, est, il est vrai, très réduit. On attend des expériences approfondies et des examens plus conclusifs.

 

 

 

 

 

 

(octobre 2021)

1. É. Berriot-Salvadore, « La littérature médicale en français de 1500 à 1600, » Université de Paris – Bibliothèques d’Universités de Paris – Histoire de la santé (en ligne). Je remercie V. Boudon-Millot, P. Bouras-Vallianatos, G. B. Faguet, S. Fortuna, Ph. Genoud, O. Gobin, M. Hague-Yearl, G. Houston, J. Rouëssé et L. Szczygiel de l’aide apportée à la rédaction de cette étude et de leurs encouragements. Je dois des remerciements particuliers à M. Collart pour la relecture attentive de cet article.

2. A. Carlino, « Introduction. Style, langue, profession : quelques enjeux de l’irruption du vernaculaire dans la littérature médicale du xvie siècle », dans Vulgariser la Médecine. Du style médical en France et en Italie, éd. A. Carlino et M. Jeanneret (Genève : Droz, 2009), p. 9-31.

3. M. Koźluk, « Pour satisfaire tant aux doctes, que aux peu savans. Traduction et terminologie médicale en France à la Renaissance », Journal de la Renaissance 5 (2007), p. 223-230.

4. L. Demaitre, « Medieval notions of cancer: malignancy and metaphor », Bulletin of the History of Medicine 72 (1998), p. 609-637; Medieval Medicine. The Art of Healing, from Head to Toe (Santa Barbara: Praeger, 2011).

5. L. Loviconi, Le diagnostic différentiel au Moyen Âge : distinguer les maladies d’apparence voisine (Paris : Garnier, 2020). Dans « Le traitement chirurgical des tumeurs au xviiie siècle : question académique et question de pratique », dans Lutter contre le cancer (1740–1960), éd. D. Foucault (Toulouse : Privat, 2012), p. 31-47, J.-L. Bousigue écrit à raison que, « dans l’immense famille des tumeurs contre-nature […], les anatomistes avaient jeté pêle-mêle une très grande variété de grosseurs dont la plupart n’avaient rien à voir avec le cancer ». On trouvait là « phlegmons, furoncles, anthrax, épanchements de toutes sortes et en toute situation (abdominale, articulaire, hydrocèle), loupes », etc. Cependant, de nombreux auteurs modernes ont compris le terme « cancer » et sa famille comme renvoyant bien, dans les anciens textes et dans un certain nombre de cas, surtout quand il s’agissait de références au cancer du sein, à ce que nous entendons aujourd’hui par cette maladie, c’est-à-dire à la tumeur en tant que maladie ayant atteint son stade effectif, incontestable et, pour les chirurgiens, irrémédiable, et non à un stade préliminaire et potentiel. Bornons-nous à citer J. Demaitre, D. J. Th. Wagener, J. Rouëssé, S. I. Hajdu, R. Jütte, M. Kaartinen, G. B. Faguet, A. Skuse, D. Bertoloni Meli ou M. Stolberg. Voir D. Droixhe, « Tracing tradition. The idea of cancerous contagiousness from Renaissance to Enlightenment », History of European Ideas 46/6 (2020), p.754-765 (en ligne). Sur un plan plus général, voir : Rather, L. J., The Genesis of Cancer. A Study in the History of Ideas (Baltimore/London : Johns Hopkins University Press, 1978) ; J. S. Olson, The History of Cancer. An Annotated Bibliography (New York : Greenwood Press, 1989) ; D. Cantor, « Cancer », dans Companion Encyclopedia of the History of Medecine, éd. W. F. Bynum et R. Porter (London/NewYork : Routledge, 1997), p. 537-561.

6. R. J. Durling, « A chronological census of Renaissance editions and translations of Galen », Journal of the Wartburg and Courtauld Institute 24/3-4 (1961), p. 230-305.

7. V. Worth-Stylianou, Les traités d’obstétrique en langue française au seuil de la modernité. Bibliographie critique des ‘Divers travaulx’ d’Euchaire Rösslin (1536) à l’’Apologie de Louyse Bourgeois sage femme’ (1627) (Genève : Droz, 2007), p. 64-65 : « Écrire en français pour les chirurgiens », dans chap. V, « L’emploi de la langue française : enjeux et querelles », p. 63-74.

8. A. Paré, Briefve collection de ladministration anatomique (Paris : En la boutique de Guillaume Cavellat, 1549), p. avi r°-avi v°. Sur Canape et Paré, voir Worth-Stylianou, op. cit., p. 64, 119 et 129.

9. Il mentionne, en tant que « première version française d’un texte galénique » : Le questionnaire des Cirurgiens et Barbiers Avec le formulaire du petit Guydon en cirurgie… Avec le Quatriesme livre de la Therapeutique ou Methode curative de Claude Galien (Paris, 1537), qui fut repris plus tard par Robert Coplande, Jean Canape, Pierre Tolet, Guillaume Chrestian, Jean Brèche et Jean Dalechamps.

10. Voir sa bibliographie dans « Editions and translations of Galen from 1490 to 1540 », dans Brill’s Companion to the Reception of Galen, éd. P. Bouras-Vallianatos et B. Zipser (Leiden et Boston : Brill, 2019), p. 437-452. On verra également, sur la manière dont s’est constituée l’organisation moderne des traités de Galien, en particulier sous l’influence de Giovanni Battista Da Monte, C. Domingues, « L’aménagement du continent galénique à la Renaissance : les éditions grecques et latines des œuvres complètes de Galien et leur organisation des traités », dans Lire les médecins grecs à la Renaissance. Aux origines de l’édition médicale, éd. V. Boudon-Millot et G. Cobolet (Paris : Bibl. Interuniversitaire de médecine, Paris 6 – CNRS – Paris 4 / De Boccard, 2004), p. 163-185.

11. En ligne archive.org.

12. C. Galenus, Ad Glauconem de medendi methodo lib. II, dans Medicorum graecorum opera quae exstant. éd. C. G. Kühn (Leipzig : C. Cnobloch, 1821-1833), t. XI, p. 103-108, 108-111 et 139-144, désormais cité MGOE; C. Galien, Œuvres anatomiques, physiologiques et médicales, traduites sur les textes imprimés et manuscrits, précédées d’une introduction par Charles Daremberg (Paris : Baillière, 1856), II, 762-766, désormais cité DAR.

13. J. Rouëssé, Une histoire du cancer du sein en Occident (Paris : Springer, 2011), p. 5.

14. Galeni Definitiones medicae, dans MGOE, t. XIX, p. 442. Communication V. Boudon-Millot.

15. Op. cit., p. 443.

16. Ad Glauconem, MGOE, ibid ; DAR, ibid.

17. On regrettera néanmoins qu’il n’ait pas été jugé utile de reproduire d’après Daremberg ce chapitre XII dans l’édition des Œuvres médicales choisies de Galien par A. Pichot (Paris : Gallimard, 1994), 320-31. On n’y a pas non plus maintenu, comme il est d’usage, les références à l’édition de Kühn, On laissera donc ici de côté le traitement du cancer chez Aulus Cornelius Celsus dans le De medicina (V, 28.2) ainsi que A.-J. Fabre, « Le cancer dans l’Antiquité. Les enseignements de Celse », Histoire des sciences médicales 42/1 (2008), 63-70. Communication de V. Boudon-Millot (16 avril 2021).

18. D. Droixhe, « Treatment using chalybs, according to Johannes Hartmann and Eberhard Gockel: A remedy against diseases of the liver and the spleen in 17th century Germany », Deposit Philipps-Universität Marburg (04-01-21) (lien). Version revue et abrégée dans « Le traitement par le chalybs chez Johannes Hartmann et Eberhard Gockel. Un remède contre les maladies du foie et de la rate en Allemagne au xviie siècle », Revue d'Histoire de la Pharmacie 69/411 (2021), 389-396.

19. D. Droixhe, Alimentation et maladie. Consultations à Padoue à l’aube des temps modernes (Bruxelles : Académie royale de Belgique, 2021) ; « Toutes ces choses bizarres que les gens prennent comme nourriture. Poisson, cancer et consultations à Padoue au début des temps modernes », Archives Internationales d'Histoire des Sciences, sous presse.

 

 

20. The Osler Library Newsletter 107 (2007), p. 1-5.

21. Claudii Galeni Pergameni De arte curativa ad Glauconem libri duo, Nicolao Leoniceno interprete (Paris : Apud Simonem Colinaeum, 1528).

22. La notice BnF se réfère au Répertoire des imprimeurs parisiens… depuis l’introduction de l’imprimerie à Paris 1470- jusqu’à la fin du seizième siècle de Philippe Renouard (1965) et au Dictionnaire abrégé des imprimeurs-éditeurs français du seizième siècle de Jean Muller (1970).

25. « "Puiser à la claire fontaine" : Hippocrate et Galien », Vulgariser et divulguer. Ambroise Paré. Chirurgien et écrivain français (en ligne).

26. N. F. J. Eloy, Dictionnaire historique de la médecine ancienne et moderne. Tome premier, Mons, Chez H. Hoyois, 1778 ; J.E. Dezeimeris, Dictionnaire historique de la médecine ancienne et moderne. Tome premier. Deuxième partie, Paris, Béchet Jeune, 1831.

27. Op. cit., p. A4 sv.

28. Notice BnF. NUMM-60407. Reproduction d’après une microforme de la série Italian books before 1601 (Cambridge, Mass. : Omnisys, c. 1990). J. A. van der Linden mentionne deux éditions latines du De ratione curandi ad Glauconem libri duo d’Akakia, avec les commentaires de celui-ci : l’une est publiée par Simon de Colines en 1538, dix ans après l’édition de Leoniceno déjà citée ; l’autre est publiée à Lyon par Guillaume Rouillé ou Roville ou Rouville en 1551 (De scriptis medicis libri duo, Amsterdam, Apud Ioannem Blaeu, 1662, p. 463-464, 510). Le catalogue de la BnF mentionne, via les microformes de la série Italian books before 1601 (Cambridge, Mass. : Omnisys, c. 1990), une autre édition d’Akakia publiée en 1547 à Lyon par les frères Beringen ou Bering.

29. Op. cit., Tome premier, 1828, p. 60-61 ; J. Chevron, « Martin Akakia. Médecin de François Ier », Mémoires de la Société d’Agriculture, commerce, sciences et arts du département de la Marne 2e série, t. 20 (1922-1923 et 1923-1924 (1925), p. 261-280.

30. « Akakia (Martin) », dans J.-E. Dezeimeris, Dictionnaire historique de la médecine ancienne et moderne. Tome premier (Paris : Béchet jeune, 1828), p. 60-61 

31. « Brissot (Pierre) », dans Dezeimeris, Dictionnaire. Tome premier. Deuxième partie (Paris : Béchet jeune, 1831), p. 517-520. Il est étonnant que Brissot ne soit pas mentionné dans Brill’s Companion to the Reception of Galen, éd. P. Bouras-Vallianatos et B. Zipser (Leiden / Boston : Brill, 2019).

32. Pierre Bayle, Dictionnaire historique et critique. Cinquième édition (Amsterdam et al. : Chez P. Brunel et al., 1740), p. 121.

33. M. Akakia, De morbis muliebribus, dans I. Spachius, Gynaeciorum sive de mulierum tum communibus, tum gravidarum, parientium, et puerperarum affectibus et morbis, Strasbourg, Sumptibus Lazari Zetzneri, 1597, p. 745-801.

34. Durling, loc. cit., p. 240, note 55.

35. Dictionnaire du Moyen Français (DMF 2015), ATILF - CNRS & Université de Lorraine, sub v°.

36. Worth-Stylianou, op. cit., p. 176 note à propos des Cinq livres de la manière de nourrir et gouverner les enfans dès leur naissance de Simon de Vallambert (1565) – « la première œuvre sur la pédiatrie à paraître en langue française » – que « l’ouvrage a pu intéresser également les médecins moins spécialistes que lui, comme les médecins provinciaux qui auraient lu les versions françaises de Guillaume Chrestian ». Voir S. de Vallambert, op. cit., éd. critique par C. H. Winn, avec la coll. de M. E. Gregg pour le glossaire et le répertoire (Genève : Droz, 2005).

37. Sur cet épisode, voir Worth-Stylianou, op. cit., p. 76.

38. Hippocrates de la nature de l’enfant au ventre de la mere, traduict de Grec, & Latin en François, par Maistre Guillaume Chrestian (Reims : Chez N. Bacquenois, 1553).

39. Op. cit, p. 3 sv.

40. En principe (ce serait à vérifier), l’ouvrage reparaîtra en 1556 sous le titre de Galien. De la formation des enfans au ventre de la mère ou Galien. De la formation des enfants au ventre de la mère sous deux adresses parisiennes différentes. (en ligne).

41 J. Dubois ou Sylvius, Livre de la nature et utilité des moys des femmes et de la curation des maladies qui en surviennent composé en latin (Paris : Chez Guillaume Morel, 1559) ; Sur « Guillaume Chrestian. Traducteur d’Hippocrate et de Jacques Dubois », voir Worth-Stylianou, op. cit., p. 143-172. Sur la présence de ce traité dans la bibliothèque de Diane de Poitiers et dans la Bibliothace medica de Pascal Lecoq dit Gallus (1590), la première bibliographique médicale, comprenant une liste de 1224 auteurs, voir Worth-Stylianou, op. cit., p. 27, 43. Sur la circulation de l’ouvrage parmi les chirurgiens, voir ibid, p. 122. On mentionnera également une traduction d’Hippocrate par Chrestian, parue sous le titre De la nature de l’enfant au ventre de la mere (Rheims : Chez N. Bacquenois, 1553). Ces ouvrages figurent dans l’intéressante évaluation statistique que l’auteure établit concernant la proportion de livres en français « sur la médecine de la femme ou sur la génération » par rapport à d’autres catégories d’ouvrages en vernaculaire : ceux « portant sur la pharmacopée », « ceux consacrés à la chirurgie », « les ouvrages sur la peste », « les descriptions générales du corps humain » et « les régimes de santé » (Worth-Stylianou, op. cit., p. 44-45).

42. N. Hanafi, « Introduction. Pudeur des souffrants et pudeurs médicales », Histoire, médecine et santé 1 (2012), p. 9-18 (Pudeurs).

43. Voir D. Droixhe, Soigner le cancer au xviiie siècle. Triomphe et déclin de la thérapie par la ciguë dans le Journal de Médecine (Paris : Hermann, 2015).

44. Worth-Stylianou, op. cit., p. 73.

45. Galenus, Ad Glauconem, éd. Kühn. On prend ici pour exemple le début du chapitre VI.

46. La BNF n’en fournit hélas pas de version informatique ; une copie photographique m’a heureusement été procurée par M. Collart.

47. Galien, De arte curativa, éd. Leoniceno, 1528, op. cit., p. 40.

48. C. Galeni Pergameni De ratione curandi ad Glauconem libri duo, interprete Martino Acakia Catalaunensi doctore medico. Eiusdem interpretis in eosdem libros Commentarii (Venise : Apud Iuntas, 1542), p. 285 r°-292 r°.

49. Galien, De ratione curandi, éd. Akakia, 1542, ibid.

50. Claudii Galeni Pergameni De arte curativa ad Glauconem, libri duo. Nicolao Leoniceno Vincentino interprete. Quibus accesserunt accuratissima animadversiones ex veneto exemplari excerptae (Lyon : Apud Gulielmum Rovillium, 1549), p. 92 r°.

51. Op. cit., p. 70 r°-90 r° (« Ch. II. De causis inflammationum », alors que l’éd. de 1538 avait « De causis inflammationis ») ; p. 90 r°-92 r° (« Ch. III, De oedemate »), etc.

52. Op. cit., p. 103.

53. DAR, p. 505.

54. Op. cit., p. 762.

55. Dictionnaire du Moyen Français (1330-1500), ATILF - CNRS & Université de Lorraine, sub v° (lien).

56. Galien, De arte, éd. Leoniceno, 1528, p. 41 v° ; Galien, De ratione, éd. Akakia, 1542, p. 291-292. Différences mineures, respectivement : fortibus medicamenis/vehementibus medicamentis, fortissimis potionibus/validissimis potionibus, etc. La confusion entre les deux affections guettait cependant, car l’une et l’autre étaient dures au toucher (DAR, chap. VIII, p. 766).

57. OL, Eiii v°, l. 1.

58. GC, 70 v°, l. 27 ; il est tenu compte de la ligne occupée par le titre.

59. F.E.W., XXIV refonte, 346 ; DMF : Dictionnaire du Moyen Français (DMF 2015), ATILF - CNRS & Université de Lorraine (lien).

60. OL, p. Eiv r°, l. 16 ; GC, p. 72 r°, l. 3. Leoniceno utilisait le terme aperire « ouvrir » (p. 48 v°, l. 9), Akakia celui de delere « anéantir, détruire » (p. 293, l. 24).

61. OL, p. Ei r°, l. 30-31 ; GC, p. 66, r°, l. 11.

62. GC, p. 9 r°, l. 21.

63. DAR, p. 745.

64. G, éd. Leoniceno, p. 41 v°, l. 11-16 ; G, éd. Akakia, p. 289, l. 3-7 ; DAR, p. 764.

65. OL, p. Eiii r°, l. 11-15.

66. GC, p. 68 v°, l.6-7 et 69 r°, l. 1-4.

67. Ibid., s. v°.

68. OL, p. Eii r°, l. 16 ; GC, p. 67 r°, l. 29.

69. OL, p. Eii r°, l. 24-26.

70. GC, p. 67 v°, l. 9-11.

71. G, éd. Leoniceno, p. 41 r°, l. 5-7.

72. OL, p. Eii r°, l. 24-27.

73. GC, p. 70 r°, l. 21-24.

74. P.-J.-B. Chomel, Abrégé de l’histoire des plantes usuelles (Paris : Chez Charles Osmont, 1712), p. 186-187.

75. « De lienis obstructionibus et duritie, cum periculo hydropis et reliquiis quartanae febris, pro doctissimo iuvene Utinensi, domino Ioanne Baptista Luvisino », dans G.B. Da Monte, Consilia medica omnia, quae ullibi extant, éd. J. Donzellini (Nuremberg, 1559), p. clxxxvii—clxxxix. Voir I. Maclean, « Trois facultés de médecine au xvie siècle : Padoue, Bâle, Montpellier », dans Échanges entre les universités européennes à la Renaissance, éd. M.-M. Fragonard et M. Bideau (Paris : SFDES, 2004), p. 349-358, ici p. 350-353 ; I. Maclean, Le monde et les hommes selon les médecins de la Renaissance (Paris : CNRS Éd., 2006), p. 16-17, 40-43, etc. ; Nouvelle éd., 2016, en ligne OpenEdition.

76. OL, p. Eiv r°, l. 6-9.

77. GC, p. 71 v°, l. 22-27.

78. Chomel, op. cit., p. 265-266.

79. Pline l’Ancien, Histoire naturelle, textr traduit, présenté et annoté par S. Schmitt (Paris : Gallimard, 2013), livre XIII, ii, 11, p. 616.

80. Respectivement : BNF, 8-TE17-3, 8-TE17-3 (A) et Londres, The Wellcome Library, hin-wel-all-00000835-001 ; BNF, 8-TE17-3 (B) ; Paris, Bibliothèques d’Université de Paris, 33302A.

 

 

81. BNF, FRBNF30475909, RES-TE17-275 (1).

82. BNF, FRBNF30475910, RES-TE17-275 (2).

83. BNF, FRBNF37248284, NUMM-54062 ; FRBNF30475919, 8-TB65-2.

84. BNF, FRBNF30475975, 8-TE138-3

85. Voir Droixhe, Soigner le cancer au xviiie siècle, p. 16-17, 25-29, 233-236, etc.

86. L’Atlas linguistique de la France ne comporte que l’entrée « Un bain » (carte n° 105).

Figure 1 : Claude Galien (ca 129 – ca 201 ap. J.-C.) (gravure Georg Paul Busch, ca 1750, Wikimedia Commons).

 

Évelyne Berriot-Salvadore écrit, à propos de l’édition des textes majeurs de Galien à la Renaissance, à partir des années 1530 :

En un siècle, le vernaculaire conquiert de nouveaux espaces, par le nombre des éditions et des lieux d’impression ou de diffusion, par la diversité des textes et enfin par le public visé1.

Par ces traductions en vernaculaire, qui répondent à la fois à « un souci de santé publique » et au « besoin institutionnel » de « défendre le prestige de la Faculté et de l’art contre les erreurs de tous les praticiens ignorants », « une sorte de bibliothèque minimale pour les barbiers et chirurgiens de robe courte » se constitue rapidement. On y trouve notamment « les livres de Galien qui leur sont indispensables, comme La méthode thérapeutique, Du mouvement des muscles, ou De l’anatomie des os ».

Andrea Carlino souligne pour sa part, en introduction d’un volume sur Vulgariser la médecine, à quel point l’écriture médicale en vernaculaire est associée à une double émergence : celle « d’un nouveau public de lecteurs » et celle « d’une reconfiguration de cette discipline en relation aux pratiques discursives adoptées2 ». Le transfert d’un savoir mobilise d’une part des moyens culturels inédits et engage d’autre part les auteurs à réfléchir à la posture qu’ils adoptent en traduisant certains textes et « aux statuts de ces textes en vernaculaire ». En résumé, l’opération donne à lire une médiation qui comporte une transmission : celle « d’un régime d’énonciation à l’autre » et celle « d’un groupe socio-culturel à l’autre », dans une « optique historienne ».   

La traduction s’accompagne par ailleurs du problème posé par l’élaboration d’une nomenclature propre. « Comme en botanique », écrit Magdalena Koźluk,

la médecine de l’époque avait à faire face à des problèmes d’identification de ses objets, liés à la persistance d’une tradition ancienne souvent confuse3.

Luke Demaitre a bien montré comment une telle identification, au Moyen Âge, se heurtait à une certaine « inconsistance » terminologique, notamment en matière de « cancer » : une notion qu’il s’agit, dit-il, de considérer en tenant compte des « implications médicales de l’époque » et à partir de définitions ou d’analogies dûment mises en relations, plutôt que du point de vue de la science actuelle4. Une nouvelle approche des procédures d’identification des maladies référencées à l’époque a été proposée par Lætitia Loviconi5.

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On pourrait se demander, écrivait Richard J. Durling dès 1961 dans une étude devenue classique, pourquoi le français, l’italien ou l’allemand n’ont pas été davantage utilisés « pour approvisionner ceux de leur public ayant peu de connaissance du latin et encore moins de grec6 »:

La réponse est bien sûr que la majorité des lecteurs potentiels étaient passés par les cours universitaires des arts avant d’entreprendre l’étude de la médecine et étaient dès lors compétents en latin.

Parmi ces lecteurs figuraient les chirurgiens, qui généralement, souligne Valérie Worth-Stylianou, n’étaient « censés posséder que des éléments de latin, sans pour autant le lire – et encore moins l’écrire couramment7 ». Aussi les Facultés de Médecine de Paris et de Montpellier, les plus importantes du pays, proposaient-elles des cours d’anatomie en français à leur intention, et l’historienne épingle cas de Paré, qui « avoue avoir lui-même consulté des traductions de Galien fournis par Jean Canape (un des plus grands traducteurs de livres médicaux), puisqu’il n’a pleu à Dieu tant faire de grace à ma jeunesse, qu’elle aye testé en l’une et lautre langue instituée8».

Qu’est-ce qui justifiait l’attachement académique au latin ? Worth-Stylianou mentionne la mise en cause par Paré, chez les médecins, d’une jalousie motivée par des intérêts professionnels à l’égard des chirurgiens. Durling invoquait plutôt, chez les premiers, une réticence à publier les secrets de leur art et il rapporte le cas significatif de de Wilhelm Copp, contraint par la Faculté de suspendre ses lectures en langue vulgaire de l’original latin. Ceci explique, conclut-il, « pourquoi nous ne trouvons pas de version française de Galien avant la fin des années 15309».

Ces lignes datant de 1961, on imagine bien que l’état de la documentation sur les anciennes éditions et traductions de Galien s’est considérablement enrichi. D’une part, la connaissance des éditions latines a surtout progressé à partie des années 1990 grâce à Stefania Fortuna10. D’autre part, l’acquisition et la mise en ligne par l’Osler Library of the History of Medicine (Montréal, Université McGill) d’une traduction problématique de Galien, désormais désignée par OL, ont modifié les conjectures sur la plus ancienne traduction française du corpus. Il s’agit d’une traduction de l’Ad Glauconem de medendi methodo lib. II, publiée sous le titre de Deuziesme livre de Claude Galene intitulé l’art curatoire à glaucon / auquel est specialeme[n]t traicté / des différences d’inflammation et de leur cure11. L’exemplaire de l’ouvrage conservé à l’Osler Library serait le seul actuellement localisé. Le volume se dit au titre Imprimé nouvellement à Paris pour Hieroisme Denys Librayre demourant à la rue Sainct Jasque à l’enseigne de la croix blanche. Cum privilegio.

Le présent article a pour objectif limité de considérer les traitements du squirrhe dans cette édition et dans les autres traductions françaises de la Méthode thérapeutique à Glaucon, des environs de 1530 à 1570. Deux chapitres sont concernés : ceux qui, dans la célèbre traduction de Charles Daremberg, s’intitulent « Traitement du squirrhe en général » (chap. VI) et « Traitement des tumeurs de la rate et du foie » (chap. VII)12. Dans son Histoire du cancer du sein en Occident, Jacques Rouëssé écrit que le squirrhe était traditionnellement considéré, particulièrement à la Renaissance, comme la « première étape » du cancer13. L’auteur ajoute :

 Si tous les squirrhes ne mènent pas obligatoirement au cancer, il paraît peu probable que les cancers puissent survenir sans passer par le stade de squirrhe.

Dans ses Définitions médicales, Galien écrivait : « Le squirrhe est une tumeur des corps avec dureté et poids et mobilité ainsi que sans difficulté au toucher » (article CCLXXXV)14. Galien y qualifie par ailleurs le cancer ou carcinome de « tumeur maligne et très dure sans ulcère ainsi nommée d’après le crabe » (article CCCXCIII)15. Il n’y avait donc pas de relation explicite, à ce stade, entre le squirrhe et le cancer.

On pourrait s’étonner de ne pas voir ajouté à l’examen des traductions des considérations sur le squirrhe celui du chapitre XII du livre II du Glaucon où Galien envisage les « Causes et traitement du cancer et de l’éléphantiasis »16. Ceci s’explique par le fait que la traduction du livre II est incomplète dans l’exemplaire de l’OL et que le chapitre en question fait défaut. La dernière page, qui porte la signature Hiv r°, conclut le chapitre XI sur « La curation de gangrene » (référence au medicament dit tetrapharmacon et macedonicum, etc.)17. La courte sélection des passages du Glaucon examinés s’explique par ailleurs – si elle ne se justifie pas – par l’état de mes recherches personnelles sur le squirrhe et le cancer de la rate et du foie au début des temps modernes18 et sur la relation entre cancer et diététique à la même époque, particulièrement dans les consilia et consultations à Padoue19.

 

 

 

 

Le volume de l’Osler Library : aspects éditoriaux

 

Figure 2 : Édition conservée à l’Osler Library of the History of Medicine (Montréal, Université McGill). Je remercie Mary Hague-Yearl, Gregory Houston et Lily Szczygiel pour leur aimable autorisation de diffusion.

 

L’ouvrage conservant la traduction conservée à Montréal a fait l’objet d’un article intitulé « The Earliest Known French Translation of Galen (ca. 1530) at the Osler Library », dû à William Kemp20. On n’en discutera ici que les aspects généraux. Ce volume in-quarto de 32 feuillets, incomplet à la fin, se distingue des « autres éditions légèrement plus tardives de traductions françaises de Galien » en ce qu’il est imprimé « en une typographie gothique bâtarde ». La police serait de type Fraktur bien que certains caractères, en particulier les majuscules, s’apparentent plutôt au type Textura, plus anguleux. Une barre oblique est parfois utilisée pour marquer une séparation qui correspondrait plutôt, aujourd’hui, à un point entre deux phrases plutôt qu’à une virgule. Les pages ne comportent pas de pagination mais des signatures composées, selon l’usage, d’une lettre majuscule suivie d’un chiffre romain.

 

Figure 3 : page de l’édition de l’Osler Library illustrant certains aspects de la typographie : barre oblique marquant une séparation correspondant à un point entre deux phrases (lignes 7, 16, 26), signature.

 

« Le colophon », poursuit Kemp, « a dû contenir la date d’impression, mais la page de titre ne l’a pas – bien qu’elle mentionne le nom de l’imprimeur parisien, Jérôme Denis ». La traduction serait postérieure à 1528, date de parution de l’édition latine sur laquelle elle se fonde, c’est-à-dire le De arte curativa ad Glauconem libri duo donnée par Niccolò Leoniceno et publiée par Simon de Colines21.

 

Figure 4 : Paris, Bibliothèque nationale de France, 8-TE17-10 (cliché Muriel Collart).

 

Selon une notice biographique du catalogue de la Bibliothèque nationale de France, la période d’activité de Jérôme Denis se situerait entre 1527 et 1534. S’il fut « condamné au bûcher comme hérétique lors de l’affaire des Placards en octobre-décembre 1534 », « il est possible qu’il n’ait pas été supplicié22 ». Une seconde notice biographique de la BnF – qui n’est malheureusement pas mise en rapport avec la précédente – nous apprend que Denis s’établit en 1529 à l’adresse de l’imprimeur-parisien Guillaume Du Puis, décédé avant cette date23. Une inscription figurant à la page de titre du Deuziesme livre de Claude Galene intitulé l’art curatoire à glaucon, sous les personnages de Clio et de Terpsichore, peut se lire « XXVI » ou « DXXVI », mais ne peut renvoyer à 1526.

Tout paraît donc indiquer, comme le suggèrent Kemp et Véronique Boudon-Millot, que le volume parut aux environs de 1530. Denis était à l’époque intéressé par l’édition médicale puisqu’il publie cette année-là le De morbis et symptomatis, libri sex de Galien24. V. Boudon-Millot conclut que cette datation, « si elle est exacte (le colophon qui devait contenir la date d’impression a disparu), remettrait en cause l’antériorité de l’imprimerie lyonnaise pour les traductions françaises de Galien », dans la mesure où « la traduction française du livre IV du De methodo medendi par Jean Canape, parue à Lyon chez F. Juste en 1537, a longtemps été considérée comme la plus ancienne traduction galénique en langue française 25 ».

 

 

Guillaume Chrestian, auteur de la deuxième traduction française du Glaucon  (1549)

En 1549 paraît la deuxième traduction française de l’Ad Glauconem de medendi methodo lib. II de Galien. Elle est publiée par le Parisien Regnault Chaudière et son fils Claude. L’ouvrage s’intitule Le second livre de Claude Galien a Glaucon de l’art de curer monsieur maistre Guillaume Chrestian, medecin, lisant a Orleans. On désignera désormais cette traduction par GC.

Guillaume Chrestian, aussi appelé Chrestien ou Cristian (1500-1558), n’est mentionné ni par Eloy ni par Jean-Eugène Dezeimeris dans leur Dictionnaire historique de la médecine ancienne et moderne26. Il fut pourtant un des médecins de François Ier et l’un des plus importants traducteurs, en français, des œuvres de Galien.

Il avait participé dès 1536 à leur diffusion en donnant un Philalethes sur les erreurs anatomiques de certaines parties du corps humain. L’ouvrage portait en colophon : « Imprime a Lyon par Iehan Barbou, dict Le Normand, 1536 ». Il était cependant vendu à Orléans par le libraire François Gueiart ou Gueiard. Il s’ouvre par un morceau qui le destine « à l’érudition des nouveaux chirurgiens 27 ». Les circonstances de la publication y sont explicitées. Au couvent des Jacobins d’Orléans s’est tenue une « dispute » sur des questions d’anatomie. Le débat a notamment porté sur les « huit muscles de l’abdomen que les Grecs appellent Epigastrion », sur « un pannicule charneux » dont il est fait mention et sur « certaines autres parties ». Celui qui est désigné sous le nom de Philalethes a longtemps pressé Chrestian par ses « prières » de s’exprimer « plus vivement par écrit » sur l’objet de la discussion. C’est que Chrestian a « souvent assez intentivement » contredit son interlocuteur. Il a cependant réservé sa réponse, tant il était occupé « à plus haute chose, ou à tout le moins à moi plus profitable », c’est-à-dire, peut-on croire, à ses activités de traducteur. Il trouvait peu soutenable qu’une « telle noble science » comme la médecine soit « contemnée » – méprisée, dégradée – « si elle est faite trop vulgaire et commune à un chacun qui n’est adonné à cet art ou qui n’a savoir suffisant des lettres latines ». Chrestian s’adresse dès lors dans ces termes à son interlocuteur :

Il faut nécessairement que je te le déduise en langage François, par ce que tu t’excuses ne pouvoir bien entièrement entendre ce qu’en langue Latine très ornée en ont écrit et traité les bons auteurs. 

Il s’agira donc pour lui « de faire connaître aux autres Chirurgiens la pure et légitime vérité », afin qu’ils ne s’égarent plus en « erreurs tant dommageuses pour le corps humain ».

Dix ans plus tard, il adresse l’avant-propos de sa traduction de la Méthode à Glaucon au « très avisé Martin Akakia, docteur en médecine, très expérimenté dans l’une et l’autre langue ». Il s’est en effet fondé sur l’édition latine de l’Ad Glauconem de medendi methodo lib. II qu’avait donnée « voici six ans » Martin Akakia. Comme l’avant-propos est daté du 26 avril 1548, la précision renvoie à l’édition Akakia publiée en 1542 à Venise par les Giunti (illustration 8)28.

Martin Akakia, autre figure majeure de la traduction française d’ouvrages médicaux et également attaché à François Ier, fut « le chef d’une famille qui se distingua longtemps dans la médecine », écrit Dezeimeris29. Il était né à une date indéterminée à Châlons-sur-Marne comme l’indique la qualification qu’il revendique de cataleunensis, parfois malencontreusement interprétée comme catalan30. Il s’était fait remarquer par Pierre Brissot (1478-1522), professeur de la Faculté de médecine qui s’était rendu célèbre pour avoir dégagé la doctrine d’Hippocrate et de Galien des détournements ou falsifications des Arabes, particulièrement Rhazès et Avicenne, qui dominaient l’enseignement européen31. Pierre Bayle avance qu’Akakia apprit de Brissot « la plupart des choses qu’il publia ensuite sur Galien »32. Il est l’ami de Marot, valet de chambre du roi, et il est choisi en 1545 pour représenter l’Université à la première séance du Concile de Trente – même si la France, jugeant que l’Empire domine les débats, dédaigne la rencontre. On lui attribue parfois le De morbis muliebribus libri II, paru en 1597.33 Mais l’ouvrage serait de son fils, également prénommé Martin.

Figure 5 : Portrait de Martin Akakia (Paris, Collection Académie nationale de chirurgie, cote CIPB1461. Licence ouverte).

L’avant-propos adressé par Chrestian à Akakia en dit davantage sur ses préoccupations. Chrestian a pensé, comme d’autres, auparavant,

qu’il était dommageable de mettre des livres de chirurgie en langue vulgaire, dans les mains d’un public peut-être trop ordinaire et d’une multitude ignorante qui ne comprendrait que de travers un art et des œuvres qui seraient ainsi corrompus.

Mais il a bien dû constater par sa pratique régionale à quel point les étudiants qu’il côtoyait étaient moins formés en latin que ceux de Paris. Et que dire, ajoute-t-il, de ces barbiers – ces tonstrini peut-être qualifiés « pour couper, peigner ou orner les barbes » ? Ils sont plus incultes que des enfants, des adolescents et des apprentis « dont la plupart ne savent même bien s’exprimer ou écrire en français », au point « qu’il leur manque ce que postule la doctrine, c’est-à-dire la connaissance des belles lettres »34 . Il y a une différence entre s’occuper des soins capillaires ou de s’amuser avec un cornet à dés (fritillus) et « l’art saint et noble » de la chirurgie.

Les erreurs qu’entraîne une mauvaise connaissance des langues peuvent être hautement nuisibles. Chrestian en donne des exemples qui concernent la gangrène ou le lupus, c’est-à-dire le loup ou la loupe « tumeur indolente et enkystée qui vient sous la peau »35. On contribuera à les prévenir en donnant en français à ceux qui sont insuffisamment formés « quelques écrits de Galien, convenables pour l’apprentissage de la chirurgie »36.

 

 

Chrestian, médecin du peuple et des grands

Un épisode illustre l’attention que Chrestian portait à cette large diffusion de l’œuvre de Galien37. En 1553, il donne une traduction du traité d’Hippocrate Περί φύσιος παιδίου sous le titre De la nature de l’enfant au ventre de la mere38.

 

Figure 6 : Édition conservée à l’Army Medical Library (Washington D.C.), reproduite dans Gallica.

 

Il prend ici les titres de Medecin de la Royne, et de Monseigneur le Duc de Buillon. Sa charge auprès de Catherine de Médicis (1547-1559) est moins significative que celle qui l’attache à la Maison de La Tour d’Auvergne, liée à la reine par Madeleine de La Tour d’Auvergne (1498-1519), mère de Catherine de Médicis. C’est en effet à la « duchesse de Buillon » que Chrestian adresse la « Préface » du livre. « Dame d’honneur de la reine », la duchesse montre une « bonté d’esprit » qui la pousse à désirer « d’entendre les choses dignes d’être connues, non seulement des hommes, qui proprement sont créés à toute philosophie, mais aussi des femmes vertueuses »39. Galien n’écrit-il pas « au neuvième livre des Sentences arrêtées d’Hippocrate, et de Platon » que les femmes « sont semblables aux hommes, en ce qu’elles sont rationnelles, et capables de science (néanmoins qu’elles y soient quelquement inférieures) »? Chrestian s’est trouvé engagé à traduire le traité d’Hippocrate par la « charité que vous fîtes, cet hiver dernier, à une pauvre femme de Sedan », qui était en très grave travail d’accouchement et pour laquelle la duchesse fit appeler Chrestian « pour lui donner secours, en votre présence ».

Les circonstances fournissent à la dame, rapporte le médecin, l’occasion de « me demander plusieurs raisons de la conception, génération, formation, nutrition, perfection, et naissance de l’enfant ». Un long texte de présentation s’ensuit, que Chrestian date du 12 avril 1553, de Château-Thierry. La ville appartenait alors à la Champagne. Le livre se présente, au titre, comme un Traicté trèsutile à tous celulx qui sont studieux des merveilleux secrets de Philosophie naturelle, et d’une partie de Medecine Physiologique. 40

Worth-Stylianou ajoute à l’épisode une autre occasion qui fut offerte à Chrestian d’initier une femme « aux grands secrets de la médecine ». Celui-ci dédie à Diane de Poitiers, favorite de Henri II, sa traduction du De mensibus mulierum et hominis generatione de Jacques Dubois ou Sylvius, sous le titre de Livre de la nature et utilité des moys des femmes et de la curation des maladies qui en surviennent (1559). Ainsi offre-t-il un secours

aux femmes tant pusillanimes et craintifves, qu’il leur sembleroit avoir engagé leur honneur, ou offensé leur pudicité si elles descouvroient leurs griefves passions aux medecins doctes et bien experimentez, qui ne peuvent toujours deviner sans preallable declaration, ne congnoistre leurs secretes maladies41.

La pudeur entourant l’expression des « secrets » d’un « corps féminin qu’une patiente n’ose nommer » ne doit cependant faire l’objet d’une rétroprojection excessive. La réticence à certains examens gynécologiques, notamment en cas d’affections de l’utérus, a parfois été insuffisamment documentée – au moins pour certaines périodes42. En tout cas, les femmes du xviiie siècle mesuraient tout à fait l’importance de palpations intimes et pouvaient décrire assez librement au praticien les étapes des maladies les plus graves, quand il s’agissait de les surmonter et, en un mot, de survivre. 43 Worth-Stylianou fait par ailleurs observer que la mise à disposition de livres de médecine en langue vulgaire, dans des milieux féminins, allait à l’encontre de l’idée d’une condamnation qui frapperait la circulation de ce genre d’ouvrage « au nom de l’immodestie et de la dissolution des mœurs »44. Sans doute la pudeur empêche-t-elle parfois les femmes de consulter un médecin et de parler de leurs « griefves passions » - « et aux dires de Guillaume Chrestian, de Laurent Joubert, ou de Charles Guillemeau, le nombre n’est pas négligeable ». Mais au moins celles qui auront pu consulter ces ouvrages ou en avoir des échos sauront-elles, selon les mêmes auteurs, « rendre compte de leurs maladies ».

 

 

Les traductions de l’Osler Library (1530) et de Chrestian (1549): un essai de comparaison textuelle

Il convient d’abord d’indiquer que l’organisation textuelle de la traduction de l’Osler Library, dénommée ici par commodité « édition de 1530 », et celle de Chrestian de 1549 offrent des différences significatives, que l’on résume. Les chapitres étaient annoncés d’une lettre dans le manuscrit grec de Galien (α, β, γ, etc.) 45. La transcription latine de 1528 fournie par Leoniceno constitue le modèle suivi par les traductions46. Dans l’édition de 1528, le chapitre VI sur le squirrhe commence par le signe , sans alinéa47. Dans la traduction de 1530, le même signe ouvre, sans numérotation, le chapitre intitulé « De la manière de curer scyrus » (p. E.i r°). L’édition latine d’Akakia de 1542, à laquelle se réfère Chrestian, introduit les chapitres sans numérotation par l’indication « TEX. », suivie du commentaire indiqué par « COMMENT. »48 Elle adopte un séquençage particulier en découpant le chapitre sur le squirrhe en sections qui portent successivement sur le squirrhe en général et les tendons, avec de longs passages de commentaires. 49 La traduction française de 1549 introduit le chapitre par « Chap. » et un numéro (« IV »)50. On notera que ce dernier ne correspond pas à l’ordre des chapitres adoptés par Kühn et Daremberg, de même que les chapitres précédents51. Le texte de 1549 se trouve par ailleurs divisé sans numérotation de chapitres par le simple titre de « GALIEN », suivi d’un texte introduit par le terme « ACAKIA ». Cet extrait correspond manifestement à la section introduite par « COMMENT. » en 1542. On notera que l’ordre des chapitres ne correspond pas ici à celui adopté par Kühn et Daremberg. L’affirmation de Chrestian selon laquelle sa version latine de référence est celle d’Akakia de 1542 est par ailleurs tout à fait vérifiée.

Dans la traduction latine de Kühn, le chapitre sur le « Traitement du squirrhe en général » commence par opposer chez Galien l’exquisitus scirrhus et le non exquisitus 52. Galien précise ce sens médical à la fin du livre I du traité Des lieux affectés, où il considère « les faits qui surviennent dans les organes » de deux points de vue : comme physiques ou comme psychiques53. Une altération résultant d’un contact des corps voisins engendrera une impression physique. L’impression psychique consistera dans le sentiment produit par l’altération, qui pourra être d’un degré variable, plus ou moins légère, à moins que les organes « n’aient une faculté sensible exquise ». Et Galien ajoute : « J’appelle exquise (ακριβης) celle qui distingue les moindres sensations ».

Daremberg traduit exquisitus/non exquisitus par « squirrhe pur » et « squirrhe qui n’est pas pur »54. Dans la traduction de 1530, exquisitus est rendu par legitime, qui est plutôt un terme de loi ou de règlement. Chrestian traduit par exquis, en se conformant à l’original (illustration 10). Ce terme, d’un point de vue moderne, peut sembler déroutant, en ce qu’il dénote aujourd’hui une sensation agréable. Le Dictionnaire de la langue française du seizième siècle de Huguet, le Dictionaire francoislatin de Robert Estienne (1539), le Trésor de la langue française et d’autre répertoires mentionnés par le Dictionnaire du moyen français fournissent pour exquisitus des traductions du type « cherché, recherché, choisi, raffiné »55. Mais le TLF enregistre aussi le sens médical de l’expression douleur exquise pour désigner une « douleur vive et nettement localisée en un point très limité », et l’emploi est encore repéré au xxe siècle chez Jean Cocteau dans le Grand écart (1923).

 

 

Histoire lexicale et professionnalisme

Le cas d’exquisitus pose la question de savoir si les variantes lexicales des deux traductions relèvent plutôt de l’histoire de la langue ou du caractère professionnel que leur prête l’auteur. L’interrogation concerne particulièrement le chapitre traitant du squirrhe de la rate ou ratelle. Galien distinguait celui-ci d’un gonflement venteux qui était en principe moins dangereux. Les éditions latines de de Leoniceno et d’Akakia s’exprimaient à ce sujet dans les mêmes termes56. Le traitement de l’affection consistait à piquer le squirrhe en y appliquant ce que l’OL appelle de l’absinthe57. Chrestian avait nommé celle-ci aluÿsne mais le terme a été barré dans l’exemplaire de la BNF et effectivement remplacé dans la marge par aluÿsne58 Le terme aluine, largement attesté en ancien et moyen français, était peut-être vieilli et risquait de ne plus être compris, à moins qu’il apparaisse davantage lié au vocabulaire professionnel59. Le produit figure en 1552 sous la forme absynthe dans la traduction française du De alimentorum facultatibus par « maistre Jehan Massé, médecin, Champenois, habitant de Saint-Florentin ».

 

Figure 7 : Paris, Bibliothèque nationale de France, 8-TC18-10 (cliché Muriel Collart).

 

À côté de la rate, Galien envisageait au chapitre VII le squirrhe du foie. Le traitement consiste à désobstruer le viscère de l’humeur dont il est chargé, c’est-à-dire, traduit l’OL, de l’ouvrir, tandis que GC emploie le terme déoppiler, proche du latin et qui semble relever davantage du langage professionnel60. Dans le même sens, l’OL traite des « parties scelerotiques endurcies » là où GC les qualifie d’incunées61. Ce terme est également utilisé par Chrestian au chapitre du Glaucon qui traite « De l’inflammation et de ses différentes espèces »62. Il y est question de l’afflux d’humeur – sang ou bile jaune – qui se concentre en un organe et qui ne se putréfie qu’une fois fixée dans celui-ci63. Bref, la traduction de l’Osler Library adopte dans les deux cas une terminologie plus simple, plus compréhensible à un large public.

Le squirrhe de ce que Galien appelle les tendons, c’est-à-dire les prolongements nerveux des muscles, réclame aussi un traitement particulier64. Une pyrite sera rougie au feu ; on versera sur celle-ci du vinaigre très mordant, de sorte que le squirrhe sera exposé à la vapeur qui s’en dégage. L’OL stipule qu’à défaut de pyrite, on emploiera « une autre pierre dicte molaris », c’est-à-dire « tant celle de quoy la meule est faicte come aussi celle qui meult le frument ou bled »65. Chrestian écrit qu’à défaut de « la pierre pyrites, qui vulgairement est appellee marcasite », on usera « de la molaire » c’est-à-dire de « la pierre de laquelle on faict les meules pour mouldre le bled »66. Comment distinguer quelle formulation serait la plus accessible ?

Un autre cas présente la même difficulté. Le jeune esclave appartenant au nommé Cercyllius souffre d’un squirrhe de la cuisse. Galien l’assied dans un récipient contenant une grande quantité d’oleum sabinum c’est-à-dire de l’huile essentielle extraite de la plante nommée sabine67. Que tirer du fait que l’OL traduit par « poille ou cuvette », moderne poêle, et que GC traduit par bagnoire ?68

 

 

La désignation des médicaments

Une différence constante, qui oppose les deux traductions, est également illustrée par le cas de l’esclave de Cercyllius. L’affection a été combattue par un enduit comportant du « bdellum scythicum », du « masticem egiptiam » et de l’ « ammoniacum vaporativum », lit-on dans l’OL69. GC traduit : « bdellium de Scythie, mastich d’Egypte, gumme ammoniac »70. On en retiendra surtout que le traducteur anonyme du volume de l’Osler Library a ajouté vaporativum à l’original latin de Leoniceno71. Ce traducteur tient à montrer qu’il connaît ce dont il parle et qu’il s’agit d’un parfum.

D’autres médicaments connaissent la même alternance entre latin et langue vulgaire. OL mentionne ceux-ci en latin en reproduisant, en général, les appellations de Galien. Ainsi, la cure du squirrhe de la rate exige le recours à des applications ou à des potions d’usage interne dont les meilleurs ingrédients sont les « cortices radicus capparis scolopendrium et mirice radix et mirice germina »72. GC utilise « l’escorce de la racine de capres, et les racines et petits rameaux de scolopendre, et de Tamarix », à condition de tous les cuire « en vinaigre, et en oxymel » 73.

Le tamarix ou tamaris était réputé en médecine, écrit Pierre-Jean-Baptiste Chomel, pour soigner « les opilations du foie, de la rate et des autres viscères »74. Il est associé à l’écorce de la racine de câpres dans une prescription adressée par Giovanni Battista Da Monte, célèbre professeur à Padoue, à un jeune homme d’Udine qui souffre « d’obstructions et de dureté de la rate, avec un danger d’hydropisie »75.

En cas de squirrhe du foie, l’OL recommande d’appliquer des emplâtres composées de « nardus indica et celtica », de « crocus », de « melinus » et d’« oenanthe mastichum chya » 76. GC traduit : on emploiera les « deux nardz », du « saffran », de l’onguent de « coings » et du « mestich de lisle Chios » 77. Le nardus, écrit aussi Chomel, pouvait être « indique », quand il venait des Indes orientales, ou « celtique », quand il venait du Tyrol ou des Alpes 78. Le premier intervenait en tant que spic-nard dans les thériaques, de sorte que son appellation latine pouvait être connue d’un assez large public, et il en va sans doute de même du mastic, une gomme-résine qui servait à activer la salivation. Mais le crocus était-il aussi immédiatement compris comme du safran par le même public ? Et le mellinum de l’OL, plus connu en latin sous la forme melinum, renvoyait-il aussi clairement à cette « huile de coings » dont parle Pline l’Ancien79?

 

 

Jean Canape, auteur de la traduction de l’Osler Library ? Les éditions de 1554, 1558 et 1570

Posée par Kemp, la question de l’identité du traducteur de l’OL peut s’éclairer par les traductions contenues dans trois autres ouvrages parus après 1550. Tous se présentent sous le titre suivant : Les six principaux livres de la Thérapeutique de Claude Galien, avec le deuxiesme De l’art curatoire à Glaucon. Ils parurent respectivement en 1554, 1558 et 1570 aux adresses d’Oudin Petit à Paris, de Thibauld Payen ou Payan à Lyon et de Jean Ruelle le jeune à Paris80.

 

 

Figure 8 : Édition de 1554 (Wellcome Collection, Creative Commons, Public Domain Mark. Reference number b10327381).

 

 

Figure 8bis : Édition de 1558 (Paris, Bibliothèque nationale de France, 8-TE17-3 (B) ; cliché Muriel Collart).

 

 

Figure 8ter : Édition de 1570 (Paris, Bibliothèque interuniversitaire de santé).

 

Le catalogue de la BNF mentionne à plusieurs reprises le nom de Jean Canape ou Canappe comme auteur de ces traductions. Jean Canape, lecteur public de chirurgie à Lyon et médecin de François Ier, était un des plus importants traducteurs de Galien en français. Il inscrit plusieurs fois son nom ou le pseudonyme de « Philiatrios » au titre de traductions de l’ancien maître, à partir de 1537 : le Quatrième livre de la Thérapeutique (1537)81 ainsi que le Cinquième et le sixième (s.d.)82 ; le traité Du mouvement des muscles (1541, 1556)83 ; les Deux livres des simples, c’est-à-dire le Cinquième et le sixième (1542)84. Plusieurs de ces éditions sont dues au Lyonnais Étienne Dolet.

On compare ci-dessous les premières lignes du chapitre sur le squirrhe dans l’OL et les trois autres traductions considérées. Les abréviations de l’OL ont été converties en fonction de l’orthographe moderne. Mais on conserve celles des autres traductions, susceptibles de suggérer une filiation de celles-ci. Il en va de même, pour ces dernières, de la ponctuation. On a conservé les graphies anciennes

OL, p. Ei r°, l. 23-28 : Scyrrus legitime est tumeur c nature insensible & dure : mais le scyrrus nõ legitime est celuy qui nest totallemẽt insensible. Touteffoys est il difficile sentimẽt dont led scyrus qui est insensible ne recoit imais curation. Davantaige qt est de celuy qui est difficile sentit fault scavoir quil nest pas du tout ĩcurable, biẽ q a peine iceluy se peult gairi.

Éd. de 1554, p. 249 v°, l. 4-12 : Scirrhus legitime est tumeur contre nature insensible & dure : mais le scirrhus non legitime est celuy qui n’est totalement insensible : toutesfois est il de difficile sentiment. Donc ledit scirrhus qui est insensible ne reçoi iamais curation. Davantaige quant est de celuy q est de difficile sentimẽt faut scavoir qu’il n’est pas du tout incurable combien que a peine iceluy se peut guarir.

Ed. de 1558, p. 249 v°, l. 3-11 : Scirrhus legitime, est tumeur cõtre nature insensible & dure : mais le scirrhus nõ legitime est celuy qui n’est totalement insensible : toutesfois est il de difficile sentiment. Donc ledit scirrhus qui est insensible ne reçoit iamais curacion. Davantage quãt est de celuy qui est de difficile sentiment, faut sçavoir qu’il n’est pas du tout incurable combien que a peine iceluy se peut guerir.

Ed. de 1570, p. 249 v°, l. 4-12 : Scirrhus legitime est tumeur contre nature insensible et dure : mais le Scirrhus non legitime est celuy qui n’est totalemẽt insensible : toutesfois est il de difficile sentiment. Donc ledict Scirrhus qui est insensible ne reçoit iamais curation. Davantage quand est de celuy qui est de difficile sentimẽt faut sçavoir qu’il n’est pas du tout incurable combien que à peine iceluy se peut guarir.

 

Le tableau ci-dessous étend et détaille la comparaison des éditions. L’indication des lignes, représentée par « l. », montre une discordance de composition.

 





 

OL – Éd. de 1530 

Éd. de 1554

Éd. de 1558

Éd. de 1570

1

Ei r°, l. 2-3 restringnẽt

249 v°, l. 20 restringnent

249 v°, l. 19-20 restraingnent

249 v°, l. 20 restraignent

2

Ei v°, l. l.5 resolutifz

249 v°, l. 23 resolutifs

249 v°, l. 23 resolutifs

249 v°, l. 23 resolutifz

3

Ei v°, l. 5 diminutiõ

249 v°, l. 24 diminution

249 v°, l. 24 diminucion

249 v°, l. 24 diminution

4

Ei v°, l 6-7. Curatiõ

249 v°, l. 26 curation

249 v°, l. 26 curacion

249 v°,l. 26 curation

5

Ei v°, l. 10 endurci

250 r°, l. 2 endurci

250 r°, l. 2 endurci

250 r°, l. 2 endurcy

6

Ei v°, l. 11 garir

250 r°, l. 4 guarir

250 r°, l. 4 guerir

25 0r°, l. 4 guarir

7

Ei v°, l. 16-17 defaillante

250 r°, l. 9 deffaillãte

250 r°, l.12

defaillante

250 r°, l. l. 9 deffailãlte

8

Ei v°, l. 18 seuffre

250 r°, l. 14 seuffre

250 r°, l. 14l souffre

250r °, l. 14 souffre

9

Ei v°, l. 21 mention

250r °, l. 18 mention

250 r°, l. 19 mencion

250 r°, l. 18 mention

10

Ei v°, l. 27 et 28

loye

250 r°, l. 25 et 27 l’oie

250 r°, l. 28 l’oye et 28 loye

250 r°, l. 25 et 27 l’oie

11

Eii r°, l. 2 dispositions

250 v°, l. 5 dispositions

250 v°, l. 5 disposicions

250 v°, l. 5 dispositions

12

Eii r°, l. 13 devoiẽt

250 v°, l. 20 devoint

250 v°, l. 21 devoient

250 v°, l. 20 devoiẽt

13

Eii r°, l. 14 et 19

(je) feroys, faisoys

250 v°, l. 21 et 27 ( je) faisoi, faisoi

250 v°, l. 21 et 28 (je) faisois

250 v°, l. 21 et 27 (je) faisois

14

Eii r°, l. 17 (je) scavoye

250 v°, l. 25 (je) sçavoi

250 v°, l. 26 (je) sçavois

250 v°, l. 25 (je) sçavois

15

Eii r°, l. 24 mention

251 r°, l. 5 mention

251 r°, l. 5 mencion

251 r°, l. 5 mention

16

Eii r°, l. 30 (je) emplastroys

251 r°, l. 13 (je) emplastroi

251 r°, 14 (je) emplastrois

251 r°, l. 13 (je) emplastroi

17

Eii v°, l. 1 (je) meslois

251 r°, l. 14-15 (je) mesloy

251 v°, l. 15 (je) meslois

251 r°, l. 14-15 je mesloy

 

L’édition de 1554 est la seule qui reproduise la forme archaïque seufre pour souffre (pt. 8), ce qui tendrait à suggérer qu’elle est la première ou la seule à avoir suivi l’original de l’OL de 1530. Mais la supposition est contredite par un fait qui joint à l’orthographe la concaténation d’un terme et de son article. L’OL écrit que la graisse de loye est la meilleure, après celle du lion, en tant que « simple médicament » applicable aux « squirrhes endurcis ». La liaison est reproduite une fois par la seule édition de 1558 : reproduction de l’édition de 1530 ou réflexe archaïsant ?

Les seules informations décisives qu’on puisse recueillir du tableau concernent l’unité typographique des éditions de 1554 et 1558. La première orthographie la première personne du singulier de l’indicatif imparfait en –oi et non en –ois (pts 13,14, 16 et 17). L’édition de 1558 orthographie en –ion les finales des mots en –tion (pts 3, 4, 9, 11 et 15). Elle est aussi la seule à moderniser l’ancienne forme garir de l’OL en guerir (pt. 5).

À l’inverse, l’édition de 1570 est la seule à reproduire la graphie resolutifz de l’OL (pt.2). Elle est même la seule à présenter la forme archaïsante endurcy qui n’est pas dans l’OL (pt. 5). Ceci est évidemment paradoxal, en considération de la date de l’ouvrage. L’édition la plus récente serait celle qui conserve l’orthographe française la plus ancienne.

Tout ceci invite à penser que la traduction de l’Osler Library serait déjà due à Jean Canape. L’entreprise peut en tout cas s’expliquer par le mouvement de concurrence qui anime alors les éditions latines à partir des environs de 1530.

 

 

Conclusion

On voudrait pouvoir conclure de manière assertive concernant plusieurs des questions posées. La principale a trait au volume acquis par l’Osler Library. Si la datation de celui-ci aux environs de 1530, déjà proposée par W. Kemp, est renforcée par la prise en compte approfondie et actualisée des conditions bibliographiques de l’édition, la possibilité d’une identification de l’auteur de la traduction est posée par les rapports étroits qu’elle entretient avec trois traductions de 1554, 1558 et 1570 dont les deux premières sont explicitement revendiquées, au titre, par Jean Canape. Celui-ci, poussé par le mouvement d’édition latine de l’Ad Glauconem de medendi methodo lib. II, qui se développe à partir de la fin des années 1520, aurait-il hésité à mettre son nom en tête d’une « vulgarisation » alors inédite ? Aurait-il assumé plus tard cette responsabilité après 1550 – à la suite précisément, de la parution de la traduction française de Guillaume Chrestian ? Il est parfaitement imaginable que celui-ci, se trouvant engagé dans une carrière de traducteur, ait voulu dépasser celui dont il était devenu le principal concurrent.

Le marché éditorial des années 1530-1550 était de nature à favoriser des entreprises rivales. On a esquissé le tableau géographique que présentent les impressions et la distribution des traductions de Galien par rapport à celui établi par Worth-Stylianou pour les lieux d’impression des livres médicaux en vernaculaire en France, et on a émis l’hypothèse d’un développement du travail de vulgarisation en Champagne, en rapport avec la création de l’Université de Reims (1548).

À côté d’un facteur s’inscrivant dans l’espace national, on a considéré quelle part la conscience du devoir professionnel et social a prise dans les conceptions de Chrestian qui étaient de nature à stimuler son travail de diffusion du galénisme. Canape et Chrestian sont tous deux attachés à François Ier. Mais le second, s’il est médecin des grands, se montre aussi praticien de terrain au service des plus humbles, lors de l’intervention par laquelle il répond à la duchesse de La Tour d’Auvergne, mère de Catherine de Médicis. Lui-même justifie longuement ses traductions en tant qu’elles sont écrites « à l’intention de nos chirurgiens » (avant-propos latin du Glaucon), qu’elles doivent servir « à l’érudition des nouveaux chirurgiens » (Philalethes) et plus généralement qu’elles sont destinées à tous ceux qui sont insuffisamment formés, tels ses étudiants de province, voire les barbiers. Si les chirurgiens appartenaient à la corporation des barbiers, ils pouvaient établir avec ceux-ci des relations qui étaient loin d’être confinées à la rivalité dont traitent si souvent certains ouvrages s’enfermant dans des images d’Épinal85. Le praticien que Galien vouait à considérer sur la plus large échelle la « distinction des moindres sensations », dans son diagnostic, était de facto invité à prendre en compte celles de ce qu’on appelle à l’âge classique le « plus grand nombre » et à y rendre sensible ses étudiants – en particulier ceux d’Orléans que Chrestian a quelque peine à former, avoue-t-il. À défaut d’une connaissance du latin égale à celle que montraient les écoliers de Paris, le passage par la traduction française offrait un substitut de première nécessité.

L’attachement géographique de Chrestian, plus déterminé que celui de Canape, et les conditions – mal connues – dans lesquelles furent composées et imprimées ses traductions ont-elles joué un rôle dans les différences textuelles relevées concernant les chapitres du squirrhe ? Le seul exemple de la reproduction latine des médicaments prescrits ouvre le champ d’interprétations très différentes et parfois opposées. Le traducteur obéit-il au respect de l’original latin de Galien, comme le fait Canape ? Répète-t-il de façon quasi mécanique les leçons de Leoniceno ou d’Akakia ? Entend-il par là montrer l’excellence de son savoir ? Songe-t-il à la manière, toute pratique, dont le soignant devra s’adresser à l’apothicaire, à qui les noms latins sont immédiatement accessibles – et d’une certaine façon plus clairs ? À l’opposé, Chrestian, en traduisant les médicaments en langue vulgaire, passe-t-il outre la pratique d’un autre âge, désuet, en appliquant strictement ses conceptions de « praticien de terrain » ?

L’éventuelle marque professionnelle du lexique se présente en outre en concurrence de la marque socialement référentielle, ce qui ne rend pas plus facile l’interprétation des différences. Quel sens donner à l’utilisation du mot baignoire – surtout si l’on s’aventure sur le terrain dialectal et régional auquel invite la forme bagnoire ?86 Le terme traduit-il, par rapport à un matériel de toilette appartenant davantage aux classes dites « populaires », un état de langue ou un état social ? On a aussi vu combien la datation de vocabulaire peut intervenir dans la concurrence d’aluine et d’absinthe. La préférence de Chrestian pour le premier terme exprime-t-elle un traditionalisme, un attachement à l’ancienne langue, au parler régional ?

Le temps et l’espace se disputent décidément des alternances qui ne peuvent, pour l’instant, que laisser l’historien perplexe. Le champ d’exploration, dans le cas traité ici, est, il est vrai, très réduit. On attend des expériences approfondies et des examens plus conclusifs.

 

 

 

 

 

 

(octobre 2021)

1. É. Berriot-Salvadore, « La littérature médicale en français de 1500 à 1600, » Université de Paris – Bibliothèques d’Universités de Paris – Histoire de la santé (en ligne). Je remercie V. Boudon-Millot, P. Bouras-Vallianatos, G. B. Faguet, S. Fortuna, Ph. Genoud, O. Gobin, M. Hague-Yearl, G. Houston, J. Rouëssé et L. Szczygiel de l’aide apportée à la rédaction de cette étude et de leurs encouragements. Je dois des remerciements particuliers à M. Collart pour la relecture attentive de cet article.

2. A. Carlino, « Introduction. Style, langue, profession : quelques enjeux de l’irruption du vernaculaire dans la littérature médicale du xvie siècle », dans Vulgariser la Médecine. Du style médical en France et en Italie, éd. A. Carlino et M. Jeanneret (Genève : Droz, 2009), p. 9-31.

3. M. Koźluk, « Pour satisfaire tant aux doctes, que aux peu savans. Traduction et terminologie médicale en France à la Renaissance », Journal de la Renaissance 5 (2007), p. 223-230.

4. L. Demaitre, « Medieval notions of cancer: malignancy and metaphor », Bulletin of the History of Medicine 72 (1998), p. 609-637; Medieval Medicine. The Art of Healing, from Head to Toe (Santa Barbara: Praeger, 2011).

5. L. Loviconi, Le diagnostic différentiel au Moyen Âge : distinguer les maladies d’apparence voisine (Paris : Garnier, 2020). Dans « Le traitement chirurgical des tumeurs au xviiie siècle : question académique et question de pratique », dans Lutter contre le cancer (1740–1960), éd. D. Foucault (Toulouse : Privat, 2012), p. 31-47, J.-L. Bousigue écrit à raison que, « dans l’immense famille des tumeurs contre-nature […], les anatomistes avaient jeté pêle-mêle une très grande variété de grosseurs dont la plupart n’avaient rien à voir avec le cancer ». On trouvait là « phlegmons, furoncles, anthrax, épanchements de toutes sortes et en toute situation (abdominale, articulaire, hydrocèle), loupes », etc. Cependant, de nombreux auteurs modernes ont compris le terme « cancer » et sa famille comme renvoyant bien, dans les anciens textes et dans un certain nombre de cas, surtout quand il s’agissait de références au cancer du sein, à ce que nous entendons aujourd’hui par cette maladie, c’est-à-dire à la tumeur en tant que maladie ayant atteint son stade effectif, incontestable et, pour les chirurgiens, irrémédiable, et non à un stade préliminaire et potentiel. Bornons-nous à citer J. Demaitre, D. J. Th. Wagener, J. Rouëssé, S. I. Hajdu, R. Jütte, M. Kaartinen, G. B. Faguet, A. Skuse, D. Bertoloni Meli ou M. Stolberg. Voir D. Droixhe, « Tracing tradition. The idea of cancerous contagiousness from Renaissance to Enlightenment », History of European Ideas 46/6 (2020), p.754-765 (en ligne). Sur un plan plus général, voir : Rather, L. J., The Genesis of Cancer. A Study in the History of Ideas (Baltimore/London : Johns Hopkins University Press, 1978) ; J. S. Olson, The History of Cancer. An Annotated Bibliography (New York : Greenwood Press, 1989) ; D. Cantor, « Cancer », dans Companion Encyclopedia of the History of Medecine, éd. W. F. Bynum et R. Porter (London/NewYork : Routledge, 1997), p. 537-561.

6. R. J. Durling, « A chronological census of Renaissance editions and translations of Galen », Journal of the Wartburg and Courtauld Institute 24/3-4 (1961), p. 230-305.

7. V. Worth-Stylianou, Les traités d’obstétrique en langue française au seuil de la modernité. Bibliographie critique des ‘Divers travaulx’ d’Euchaire Rösslin (1536) à l’’Apologie de Louyse Bourgeois sage femme’ (1627) (Genève : Droz, 2007), p. 64-65 : « Écrire en français pour les chirurgiens », dans chap. V, « L’emploi de la langue française : enjeux et querelles », p. 63-74.

8. A. Paré, Briefve collection de ladministration anatomique (Paris : En la boutique de Guillaume Cavellat, 1549), p. avi r°-avi v°. Sur Canape et Paré, voir Worth-Stylianou, op. cit., p. 64, 119 et 129.

9. Il mentionne, en tant que « première version française d’un texte galénique » : Le questionnaire des Cirurgiens et Barbiers Avec le formulaire du petit Guydon en cirurgie… Avec le Quatriesme livre de la Therapeutique ou Methode curative de Claude Galien (Paris, 1537), qui fut repris plus tard par Robert Coplande, Jean Canape, Pierre Tolet, Guillaume Chrestian, Jean Brèche et Jean Dalechamps.

10. Voir sa bibliographie dans « Editions and translations of Galen from 1490 to 1540 », dans Brill’s Companion to the Reception of Galen, éd. P. Bouras-Vallianatos et B. Zipser (Leiden et Boston : Brill, 2019), p. 437-452. On verra également, sur la manière dont s’est constituée l’organisation moderne des traités de Galien, en particulier sous l’influence de Giovanni Battista Da Monte, C. Domingues, « L’aménagement du continent galénique à la Renaissance : les éditions grecques et latines des œuvres complètes de Galien et leur organisation des traités », dans Lire les médecins grecs à la Renaissance. Aux origines de l’édition médicale, éd. V. Boudon-Millot et G. Cobolet (Paris : Bibl. Interuniversitaire de médecine, Paris 6 – CNRS – Paris 4 / De Boccard, 2004), p. 163-185.

11. En ligne archive.org.

12. C. Galenus, Ad Glauconem de medendi methodo lib. II, dans Medicorum graecorum opera quae exstant. éd. C. G. Kühn (Leipzig : C. Cnobloch, 1821-1833), t. XI, p. 103-108, 108-111 et 139-144, désormais cité MGOE; C. Galien, Œuvres anatomiques, physiologiques et médicales, traduites sur les textes imprimés et manuscrits, précédées d’une introduction par Charles Daremberg (Paris : Baillière, 1856), II, 762-766, désormais cité DAR.

13. J. Rouëssé, Une histoire du cancer du sein en Occident (Paris : Springer, 2011), p. 5.

14. Galeni Definitiones medicae, dans MGOE, t. XIX, p. 442. Communication V. Boudon-Millot.

15. Op. cit., p. 443.

16. Ad Glauconem, MGOE, ibid ; DAR, ibid.

17. On regrettera néanmoins qu’il n’ait pas été jugé utile de reproduire d’après Daremberg ce chapitre XII dans l’édition des Œuvres médicales choisies de Galien par A. Pichot (Paris : Gallimard, 1994), 320-31. On n’y a pas non plus maintenu, comme il est d’usage, les références à l’édition de Kühn, On laissera donc ici de côté le traitement du cancer chez Aulus Cornelius Celsus dans le De medicina (V, 28.2) ainsi que A.-J. Fabre, « Le cancer dans l’Antiquité. Les enseignements de Celse », Histoire des sciences médicales 42/1 (2008), 63-70. Communication de V. Boudon-Millot (16 avril 2021).

18. D. Droixhe, « Treatment using chalybs, according to Johannes Hartmann and Eberhard Gockel: A remedy against diseases of the liver and the spleen in 17th century Germany », Deposit Philipps-Universität Marburg (04-01-21) (lien). Version revue et abrégée dans « Le traitement par le chalybs chez Johannes Hartmann et Eberhard Gockel. Un remède contre les maladies du foie et de la rate en Allemagne au xviie siècle », Revue d'Histoire de la Pharmacie 69/411 (2021), 389-396.

19. D. Droixhe, Alimentation et maladie. Consultations à Padoue à l’aube des temps modernes (Bruxelles : Académie royale de Belgique, 2021) ; « Toutes ces choses bizarres que les gens prennent comme nourriture. Poisson, cancer et consultations à Padoue au début des temps modernes », Archives Internationales d'Histoire des Sciences, sous presse.

 

 

20. The Osler Library Newsletter 107 (2007), p. 1-5.

21. Claudii Galeni Pergameni De arte curativa ad Glauconem libri duo, Nicolao Leoniceno interprete (Paris : Apud Simonem Colinaeum, 1528).

22. La notice BnF se réfère au Répertoire des imprimeurs parisiens… depuis l’introduction de l’imprimerie à Paris 1470- jusqu’à la fin du seizième siècle de Philippe Renouard (1965) et au Dictionnaire abrégé des imprimeurs-éditeurs français du seizième siècle de Jean Muller (1970).

25. « "Puiser à la claire fontaine" : Hippocrate et Galien », Vulgariser et divulguer. Ambroise Paré. Chirurgien et écrivain français (en ligne).

26. N. F. J. Eloy, Dictionnaire historique de la médecine ancienne et moderne. Tome premier, Mons, Chez H. Hoyois, 1778 ; J.E. Dezeimeris, Dictionnaire historique de la médecine ancienne et moderne. Tome premier. Deuxième partie, Paris, Béchet Jeune, 1831.

27. Op. cit., p. A4 sv.

28. Notice BnF. NUMM-60407. Reproduction d’après une microforme de la série Italian books before 1601 (Cambridge, Mass. : Omnisys, c. 1990). J. A. van der Linden mentionne deux éditions latines du De ratione curandi ad Glauconem libri duo d’Akakia, avec les commentaires de celui-ci : l’une est publiée par Simon de Colines en 1538, dix ans après l’édition de Leoniceno déjà citée ; l’autre est publiée à Lyon par Guillaume Rouillé ou Roville ou Rouville en 1551 (De scriptis medicis libri duo, Amsterdam, Apud Ioannem Blaeu, 1662, p. 463-464, 510). Le catalogue de la BnF mentionne, via les microformes de la série Italian books before 1601 (Cambridge, Mass. : Omnisys, c. 1990), une autre édition d’Akakia publiée en 1547 à Lyon par les frères Beringen ou Bering.

29. Op. cit., Tome premier, 1828, p. 60-61 ; J. Chevron, « Martin Akakia. Médecin de François Ier », Mémoires de la Société d’Agriculture, commerce, sciences et arts du département de la Marne 2e série, t. 20 (1922-1923 et 1923-1924 (1925), p. 261-280.

30. « Akakia (Martin) », dans J.-E. Dezeimeris, Dictionnaire historique de la médecine ancienne et moderne. Tome premier (Paris : Béchet jeune, 1828), p. 60-61 

31. « Brissot (Pierre) », dans Dezeimeris, Dictionnaire. Tome premier. Deuxième partie (Paris : Béchet jeune, 1831), p. 517-520. Il est étonnant que Brissot ne soit pas mentionné dans Brill’s Companion to the Reception of Galen, éd. P. Bouras-Vallianatos et B. Zipser (Leiden / Boston : Brill, 2019).

32. Pierre Bayle, Dictionnaire historique et critique. Cinquième édition (Amsterdam et al. : Chez P. Brunel et al., 1740), p. 121.

33. M. Akakia, De morbis muliebribus, dans I. Spachius, Gynaeciorum sive de mulierum tum communibus, tum gravidarum, parientium, et puerperarum affectibus et morbis, Strasbourg, Sumptibus Lazari Zetzneri, 1597, p. 745-801.

34. Durling, loc. cit., p. 240, note 55.

35. Dictionnaire du Moyen Français (DMF 2015), ATILF - CNRS & Université de Lorraine, sub v°.

36. Worth-Stylianou, op. cit., p. 176 note à propos des Cinq livres de la manière de nourrir et gouverner les enfans dès leur naissance de Simon de Vallambert (1565) – « la première œuvre sur la pédiatrie à paraître en langue française » – que « l’ouvrage a pu intéresser également les médecins moins spécialistes que lui, comme les médecins provinciaux qui auraient lu les versions françaises de Guillaume Chrestian ». Voir S. de Vallambert, op. cit., éd. critique par C. H. Winn, avec la coll. de M. E. Gregg pour le glossaire et le répertoire (Genève : Droz, 2005).

37. Sur cet épisode, voir Worth-Stylianou, op. cit., p. 76.

38. Hippocrates de la nature de l’enfant au ventre de la mere, traduict de Grec, & Latin en François, par Maistre Guillaume Chrestian (Reims : Chez N. Bacquenois, 1553).

39. Op. cit, p. 3 sv.

40. En principe (ce serait à vérifier), l’ouvrage reparaîtra en 1556 sous le titre de Galien. De la formation des enfans au ventre de la mère ou Galien. De la formation des enfants au ventre de la mère sous deux adresses parisiennes différentes. (en ligne).

41 J. Dubois ou Sylvius, Livre de la nature et utilité des moys des femmes et de la curation des maladies qui en surviennent composé en latin (Paris : Chez Guillaume Morel, 1559) ; Sur « Guillaume Chrestian. Traducteur d’Hippocrate et de Jacques Dubois », voir Worth-Stylianou, op. cit., p. 143-172. Sur la présence de ce traité dans la bibliothèque de Diane de Poitiers et dans la Bibliothace medica de Pascal Lecoq dit Gallus (1590), la première bibliographique médicale, comprenant une liste de 1224 auteurs, voir Worth-Stylianou, op. cit., p. 27, 43. Sur la circulation de l’ouvrage parmi les chirurgiens, voir ibid, p. 122. On mentionnera également une traduction d’Hippocrate par Chrestian, parue sous le titre De la nature de l’enfant au ventre de la mere (Rheims : Chez N. Bacquenois, 1553). Ces ouvrages figurent dans l’intéressante évaluation statistique que l’auteure établit concernant la proportion de livres en français « sur la médecine de la femme ou sur la génération » par rapport à d’autres catégories d’ouvrages en vernaculaire : ceux « portant sur la pharmacopée », « ceux consacrés à la chirurgie », « les ouvrages sur la peste », « les descriptions générales du corps humain » et « les régimes de santé » (Worth-Stylianou, op. cit., p. 44-45).

42. N. Hanafi, « Introduction. Pudeur des souffrants et pudeurs médicales », Histoire, médecine et santé 1 (2012), p. 9-18 (Pudeurs).

43. Voir D. Droixhe, Soigner le cancer au xviiie siècle. Triomphe et déclin de la thérapie par la ciguë dans le Journal de Médecine (Paris : Hermann, 2015).

44. Worth-Stylianou, op. cit., p. 73.

45. Galenus, Ad Glauconem, éd. Kühn. On prend ici pour exemple le début du chapitre VI.

46. La BNF n’en fournit hélas pas de version informatique ; une copie photographique m’a heureusement été procurée par M. Collart.

47. Galien, De arte curativa, éd. Leoniceno, 1528, op. cit., p. 40.

48. C. Galeni Pergameni De ratione curandi ad Glauconem libri duo, interprete Martino Acakia Catalaunensi doctore medico. Eiusdem interpretis in eosdem libros Commentarii (Venise : Apud Iuntas, 1542), p. 285 r°-292 r°.

49. Galien, De ratione curandi, éd. Akakia, 1542, ibid.

50. Claudii Galeni Pergameni De arte curativa ad Glauconem, libri duo. Nicolao Leoniceno Vincentino interprete. Quibus accesserunt accuratissima animadversiones ex veneto exemplari excerptae (Lyon : Apud Gulielmum Rovillium, 1549), p. 92 r°.

51. Op. cit., p. 70 r°-90 r° (« Ch. II. De causis inflammationum », alors que l’éd. de 1538 avait « De causis inflammationis ») ; p. 90 r°-92 r° (« Ch. III, De oedemate »), etc.

52. Op. cit., p. 103.

53. DAR, p. 505.

54. Op. cit., p. 762.

55. Dictionnaire du Moyen Français (1330-1500), ATILF - CNRS & Université de Lorraine, sub v° (lien).

56. Galien, De arte, éd. Leoniceno, 1528, p. 41 v° ; Galien, De ratione, éd. Akakia, 1542, p. 291-292. Différences mineures, respectivement : fortibus medicamenis/vehementibus medicamentis, fortissimis potionibus/validissimis potionibus, etc. La confusion entre les deux affections guettait cependant, car l’une et l’autre étaient dures au toucher (DAR, chap. VIII, p. 766).

57. OL, Eiii v°, l. 1.

58. GC, 70 v°, l. 27 ; il est tenu compte de la ligne occupée par le titre.

59. F.E.W., XXIV refonte, 346 ; DMF : Dictionnaire du Moyen Français (DMF 2015), ATILF - CNRS & Université de Lorraine (lien).

60. OL, p. Eiv r°, l. 16 ; GC, p. 72 r°, l. 3. Leoniceno utilisait le terme aperire « ouvrir » (p. 48 v°, l. 9), Akakia celui de delere « anéantir, détruire » (p. 293, l. 24).

61. OL, p. Ei r°, l. 30-31 ; GC, p. 66, r°, l. 11.

62. GC, p. 9 r°, l. 21.

63. DAR, p. 745.

64. G, éd. Leoniceno, p. 41 v°, l. 11-16 ; G, éd. Akakia, p. 289, l. 3-7 ; DAR, p. 764.

65. OL, p. Eiii r°, l. 11-15.

66. GC, p. 68 v°, l.6-7 et 69 r°, l. 1-4.

67. Ibid., s. v°.

68. OL, p. Eii r°, l. 16 ; GC, p. 67 r°, l. 29.

69. OL, p. Eii r°, l. 24-26.

70. GC, p. 67 v°, l. 9-11.

71. G, éd. Leoniceno, p. 41 r°, l. 5-7.

72. OL, p. Eii r°, l. 24-27.

73. GC, p. 70 r°, l. 21-24.

74. P.-J.-B. Chomel, Abrégé de l’histoire des plantes usuelles (Paris : Chez Charles Osmont, 1712), p. 186-187.

75. « De lienis obstructionibus et duritie, cum periculo hydropis et reliquiis quartanae febris, pro doctissimo iuvene Utinensi, domino Ioanne Baptista Luvisino », dans G.B. Da Monte, Consilia medica omnia, quae ullibi extant, éd. J. Donzellini (Nuremberg, 1559), p. clxxxvii—clxxxix. Voir I. Maclean, « Trois facultés de médecine au xvie siècle : Padoue, Bâle, Montpellier », dans Échanges entre les universités européennes à la Renaissance, éd. M.-M. Fragonard et M. Bideau (Paris : SFDES, 2004), p. 349-358, ici p. 350-353 ; I. Maclean, Le monde et les hommes selon les médecins de la Renaissance (Paris : CNRS Éd., 2006), p. 16-17, 40-43, etc. ; Nouvelle éd., 2016, en ligne OpenEdition.

76. OL, p. Eiv r°, l. 6-9.

77. GC, p. 71 v°, l. 22-27.

78. Chomel, op. cit., p. 265-266.

79. Pline l’Ancien, Histoire naturelle, textr traduit, présenté et annoté par S. Schmitt (Paris : Gallimard, 2013), livre XIII, ii, 11, p. 616.

80. Respectivement : BNF, 8-TE17-3, 8-TE17-3 (A) et Londres, The Wellcome Library, hin-wel-all-00000835-001 ; BNF, 8-TE17-3 (B) ; Paris, Bibliothèques d’Université de Paris, 33302A.

 

 

81. BNF, FRBNF30475909, RES-TE17-275 (1).

82. BNF, FRBNF30475910, RES-TE17-275 (2).

83. BNF, FRBNF37248284, NUMM-54062 ; FRBNF30475919, 8-TB65-2.

84. BNF, FRBNF30475975, 8-TE138-3

85. Voir Droixhe, Soigner le cancer au xviiie siècle, p. 16-17, 25-29, 233-236, etc.

86. L’Atlas linguistique de la France ne comporte que l’entrée « Un bain » (carte n° 105).

 

Livres

 

  • - D. Bacalexi, « Trois traducteurs de Galien au XVIe siècle : Niccolò Leoniceno, Guillaume Cop, Leonhart Fuchs » dans Lire les médecins grecs à la Renaissance : aux origines de l’édition médicale, éd. V. Boudon-Millot et G. Cobolet (Paris : Bibl. Interuniv. De Médecine, Paris 5- CNRS- Paris 4), p. 247-269.

 

 

  • -E. Berriot-Salvadore, « La littérature médicale en français de 1500 à 1600 » Université de Paris – Bibliothèques d’Universités de Paris – Histoire de la santé. En ligne.

 

 

  • -V. Boudon-Millot, Galien de Pergame : un médecin grec à Rome (Paris : Les Belles Lettres, 2012).

 

 

  • -A. Carlino, « Introduction. Style, langue, profession : quelques enjeux de l’irruption du vernaculaire dans la littérature médicale du xvie siècle », dans Vulgariser la Médecine. Du style médical en France et en Italie, éd. A. Carlino et M. Jeanneret (Genève : Droz, 2009), p. 9-31.

 

 

  • - S. Fortuna, « Editions and translations of Galen from 1490 to 1540 », dans Brill’s Companion to the Reception of Galen, éd. P. Bouras-Vallianatos et B. Zipser (Leiden et Boston : Brill, 2019), p. 437-452.

 

 

  • - M. Koźluk, « “Pour satisfaire tant aux doctes, que aux peu savans”. Traduction et terminologie médicale en France à la Renaissance », Journal de la Renaissance 5 (2007), p. 223-230

 

 

  • - J. Rouëssé, Une histoire du cancer du sein en Occident (Paris, Springer, 2011).