Essai de Minéralogie du Département du Gard

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Essai de Minéralogie du Département du Gard
Auteur : Pierre de Brun (1874-1941), géologue français
Auteur de l'analyse : par Martin Tiano Docteur en chimie organique, ancien élève de l’ENS de Lyon, agrégé de chimie
Publication :

« Essai de Minéralogie du Département du Gard », Extrait du Bulletin de la Société d’Etude des Sciences Naturelles de Nîmes, Vol 29 – 42 (1902).

Année de publication :

1902

Nombre de Pages :
n.s.
Résumé :

Cet ouvrage recense les espèces minérales connues du Gard. Des plus communes aux plus rares, P. de Brun dresse un inventaire aussi exhaustif que possible des minéraux et de leurs localisations dans le département.

Mise en ligne :
Mai 2017

En 1902, Pierre De Brun, Receveur des Domaines, membre de la Société d’Étude des Sciences Naturelles de Nîmes, publie son Essai de Minéralogie du Département du Gard. Amateur éclairé, passionné de sciences naturelles, et plus particulièrement de minéralogie et de paléontologie, il dresse en une centaine de pages une liste aussi exhaustive que possible des minéraux présents dans ce département. Cet ouvrage n’est certes pas un grand classique de la minéralogie scientifique, tels que peuvent être considérés les six tomes de La Minéralogie de la France et de ses colonies par Alfred Lacroix, Professeur au Museum National d’Histoire Naturelle de 1893 à 1936, et Secrétaire Perpétuel de l’Académie des Sciences pendant 34 ans. Il n’en reste pas moins emblématique des écrits qui caractérisent la minéralogie de cette fin du XIXe et début du XXe siècle : un savoureux mélange de descriptions objectives, documentées, précises des espèces minérales, et d’éléments plus anecdotiques au style littéraire, qui fait, aujourd’hui encore, le bonheur des minéralogistes amateurs et des historiens des sciences.

 


 

 

 

Martin Tiano est ancien élève de l'École Normale Supérieure de Lyon, docteur en chimie, enseignant de physique-chimie et président de l'association de diffusion des sciences Lyon Science

Au gré des promenades minéralogiques gardoises d’un amateur éclairé, Pierre de Brun
par Martin Tiano Docteur en chimie organique, ancien élève de l’ENS de Lyon, agrégé de chimie

En 1902, Pierre de Brun (1874-1941), receveur des Domaines, membre de la Société d’Étude des Sciences Naturelles de Nîmes, publie son Essai de Minéralogie du Département du Gard. Amateur éclairé, passionné de sciences naturelles, et plus particulièrement de minéralogie et de paléontologie, il dresse en une centaine de pages une liste aussi exhaustive que possible des minéraux présents dans ce département. Cet ouvrage n’est certes pas un grand classique de la minéralogie scientifique, tels que peuvent être considérés les six tomes de La Minéralogie de la France et de ses colonies par Alfred Lacroix (1863-1948), professeur au Museum national d’histoire naturelle de 1893 à 1936, et Secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences pendant 34 ans. Il n’en reste pas moins emblématique des écrits qui caractérisent la minéralogie de cette fin du xixe et début du xxe siècle : un savoureux mélange de descriptions objectives, documentées, précises des espèces minérales, et d’éléments plus anecdotiques au style littéraire, qui fait, aujourd’hui encore, le bonheur des minéralogistes amateurs et des historiens des sciences.

 

Figure 1 : P. de Brun (collection Museums de Provence-Alpes-Côte d’Azur)

 

Un ouvrage « catalogue » accessible aux non spécialistes

Pierre de Brun revendique l’écriture d’un livre simple, accessible à un public lettré non spécialiste. Ainsi écrit-il dès son introduction :

 

Voulant éviter de faire une œuvre par trop scientifique, j'ai négligé volontairement les parties et cristallographiques et optiques [...] grâce auxquelles on tombe souvent dans un excès de formules peu compréhensibles, sinon pour les initiés. Je me range, du reste, dans la catégorie de ceux qui ne le sont pas et c'est à eux que je m'adresse.

 

Cette phrase nous interroge sur le statut d’écrit scientifique de cet ouvrage. L’auteur ne déclare-t-il pas lui-même faire partie des non-initiés aux éléments les plus rigoureux de la minéralogie ? On verra en fin d’analyse qu’il n’en est rien. Pierre de Brun assume néanmoins la tenue de propos compréhensibles, expurgés d’éléments qui nuiraient au propos global de cet essai.

Par ailleurs, s’il fallait résumer l’organisation de ce travail en quelques mots, avec la pointe de dédain qui semble parfois caractériser notre regard sur les ouvrages des naturalistes du xixe, on pourrait le qualifier d’un simple catalogue de minéraux sommairement organisé. Ils sont ainsi réunis dans quatre groupes :

  •  « les éléments des roches fondamentales » concernent les minéraux présents dans les granites, schistes, marnes et calcaires qui compose les sols gardois. On y retrouve les feldspaths, les quartz, les argiles, le talc, mais également quelques minéraux plus esthétiques et recherchés, comme la tourmaline noire, les grenats ;
  • « les éléments des gîtes minéraux » sont constitués plus spécifiquement des espèces minérales cristallines qui constituent les gisements minéraux, métalliques ou non. On y retrouve la calcite et le gypse, espèces particulièrement répandues, mais également des nitrates et des phosphates, utiles en agriculture pour la fabrication d’engrais, ou encore la fluorine et la barytine, qui n’étaient pas exploités à cette époque ;
  • « les minéraux métalliques » sont sans doute une sous-catégorie du groupe précédent, mais constituent ici une partie distincte. Outre les métaux natifs, tels que l’or ou le platine retrouvés en alluvions dans certaines rivières, ce sont des espèces contenants fer, manganèse, cuivre, zirconium, plomb, zinc, etc. qui sont listés ici ;
  • « les minéraux combustibles » sont constitués des charbons, asphaltes, et autre résines fossiles.

Bien sûr, un tel dédain n’est en rien justifié, et c’est dans le soin apporté aux détails que la lecture de cet essai de minéralogie devient captivante.

 

 

Pour chaque espèce minérale : une analyse de la littérature, des examens complémentaires, et une description du lieu de la découverte

Chaque espèce minérale s’y retrouve ainsi décrite avec soin, la littérature scientifique analysée et éventuellement questionnée, et les lieux décrits avec grande précision. Voici ce qu’on peut lire, par exemple, sur la Goethite, minerai accessoire de fer :

 

Goëthite (H2Fe2O4).

P. S. = 3, 8 à 4,4 – D = 5 à 5, 5.  Syst. rhombique[1].

Soluble dans l'acide sulfurique. Couleur variant du jaune-rougeâtre au brun-noirâtre. Poussière jaune.

Em. Dumas (t. 2 ; p. 715) la cite et je l'ai retrouvée dans les géodes siliceuses du Trias, près le souterrain d'Alzon. Elle y est du reste assez rare et s'y présente en petits cristaux aciculaires isolés, implantés entre les prismes de quartz hyalin ou les rhomboèdres de calcite, qui tapissent l'intérieur de ces géodes.

                    

Figure 2 : Goethite sur quartz, Tarn. Un aspect probablement proche de celui des géodes du souterrain d’Alzon évoquée par P. de Brun (WikiCommons, auteur Didier Descouens, CC BY 3.0 )

 

On remarque la façon assez rudimentaire, si l’on peut dire, dont sont caractérisés les minéraux : densité, dureté, mais également solubilité dans des acides, couleur de la « poussière ». Il faut cependant rappeler que ces méthodes de caractérisation sont toujours utilisées – et bien pratiques, au demeurant.

On trouvera également la réaction produite au chauffage. Ainsi de Brun caractérise-t-il l’opale :

Mêmes propriétés chimiques que le quartz, sauf qu'elle décrépite au chalumeau et ne fait pas feu au briquet [nous soulignons]

Certains minéraux ont des notices beaucoup plus développées. C’est le cas de la Blende (ZnS), un des principaux minerais du zinc, exploitée en de nombreux endroits dans le département, en particulier autour du Vigan.

 

          

Figure 3 : Blende en petits cristaux rouges, de Saint-Laurent-Le-Minier (Gard) (avec l’aimable autorisation de Le Sablais, modérateur sur le site http://www.geoforum.fr)

 

De même, les différentes variétés de quartz y sont détaillées une à une, depuis le quartz hyalin (incolore) jusqu’à l’améthyste, plutôt rare dans le département :

 

L'Améthyste (variété violette), n'existe que dans les filons au milieu du granite : au col de Lamirat, aux Plaines, à la Baumette, à Caderle, St Jean-du Gard (1) et avec la barytine au Pigeonnier (Générargues) (7); - vis à vis le moulin des Adams (Corbès) (1); – dans le lit du ruisseau de Fabret, près l'Espérou (Valleraugues) (2).